Vraiment pas mieux. L’année 2021 ne marque pas d’évolution du ressenti des territoriaux en matière de bien-être. Comme l’an passé, 55 % des sondés estiment que leur bien-être s’est détérioré, soit toujours 5 points de plus qu’en 2019 (voir le graphique n° 1). Toutefois, 15 % d’entre eux font part d’une amélioration (contre 11 % en 2020). Les catégorie A semblent moins bien accuser le coup, avec un niveau de ressenti dégradé à 58 %, en hausse de 5 points par rapport à l’année dernière.
Rien d’étonnant au regard d’une lassitude générale qui se confirme avec, notamment, une fatigue nerveuse en augmentation, contre une fatigue physique en baisse Conséquence logique de ce mal-être, le niveau de stress des agents reste important et lié à leur contexte professionnel pour 80 % d’entre eux.
Attachement à la FPT
La tension ressentie au travail est essentiellement due à la hiérarchie, selon 63 % des répondants (voir le graphique n° 2). Cette pression est d’ailleurs partagée par les trois catégories d’agents et arrive en tête devant celle exercée par les élus (42 %) et les usagers (35 %), avec une inflexion tout de même de 7 points. « Cette baisse pourrait être liée à un certain adoucissement des modes managériaux dû à la période de confinement, qui a permis aux encadrants de réaliser que les agents, même à distance, assuraient leur travail. C’est une observation que l’on fait aussi dans le reste du monde du travail », commente Alexandre Jost, fondateur de la Fabrique Spinoza, à l’origine de l’étude « Pour une fonction publique heureuse » en 2020. Reste que, parmi ceux déclarant ressentir une pression excessive au travail, seulement la moitié pense bien la gérer.
Malgré ce constat dégradé, les agents sont plus nombreux à estimer qu’ils contribuent efficacement, en ces temps de crise, à la continuité du service public (88 %, en hausse de 6 points) et aux attentes des usagers (78 %, en hausse de 10 points). Comme les années précédentes, ils considèrent à 80 % rendre un service de qualité aux usagers et veiller (pour 67 %) à la bonne gestion de l’argent public.
Dans l’ensemble, leur attachement est toujours davantage lié à la FPT (79 % sont satisfaits d’y travailler) qu’à leur collectivité (67 %). D’autres motifs de satisfaction émanent de leur organisation et de leur collectif de travail. Avec un contentement relatif aux relations qu’ils entretiennent avec leurs collègues (80 %), l’appréciation du degré d’autonomie dont ils bénéficient (78 %, en hausse de 5 points), ainsi que l’équilibre entre vies professionnelle et personnelle (70 %).
Evolution du statut
Des motifs de satisfaction malgré tout entachés par une confiance ébranlée en leur avenir professionnel (61 %, en baisse de 5 points) autant qu’en l’évolution du service public (75 % en hausse de 4 points) (voir le graphique n° 3). La perte de confiance émane davantage des catégories A (- 8 points) et B (- 6 points). Fait notable quant au statut de la FPT, les répondants ne sont que 13 % à se déclarer optimistes concernant son évolution. Un constat inquiétant, selon Alexandre Jost, pour qui, « généralement, le pessimisme collectif est compensé par un optimisme individuel, ce qui n’est clairement pas le cas ici ».
Cette confiance dans l’avenir fragilisée se double d’une crispation qui perdure, de baromètre en baromètre, sur la rémunération et la reconnaissance. La première étant généralement corrélée à la seconde. De fait, les agents se montrent plutôt critiques envers la reconnaissance dont ils bénéficient dans leur collectivité, en particulier de la part des élus (53 %), de leur hiérarchie (51 %) et vis-à-vis de leur métier (46 %). Ils sont, en revanche, plutôt satisfaits de celle émanant de leurs collègues (73 %) ainsi que des usagers (69 %).
Comme la reconnaissance, la rémunération se trouve toujours en tête des motifs d’insatisfaction des agents (71 %), alors qu’elle est l’un des premiers critères cités par les agents en tant que moteurs de leur épanouissement professionnel (voir le graphique n° 4). Quand les agents de la catégorie A accordent plus d’importance à l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, les « B » et « C » placent, comme l’année dernière, la rémunération en premier. Ce qui change cette fois est le choix, par tous les agents, d’un top 3 faisant apparaître exactement les mêmes critères comme source d’épanouissement professionnel. « La rémunération, l’aspect relationnel et l’équilibre vie personnelle - vie professionnelle sont les domaines qui ont été mis en question ou affaiblis pendant la crise », constate Nicolas Fraix, psychologue du travail et chargé de mission à l’Anact.
Des actions de prévention attendues
Justement, question bien-être, les territoriaux sont plutôt critiques sur les actions mises en œuvre par leur collectivité. Seulement un tiers des répondants affirme que leur collectivité déploie des actions de prévention et/ou de bien-être au travail. Celles-ci portent surtout sur les risques psychosociaux et les troubles musculosquelettiques et, pour une plus faible part, sur l’activité physique (9 %). Ce sont pourtant les trois domaines prioritaires attendus par les agents (voir le graphique n° 5).
Comment, alors, expliquer que seuls 44 % d’entre eux estiment ces actions insuffisamment adaptées à leurs besoins ? « Les plans “qualité de vie au travail”, les missions transversales et la sensibilisation de l’encadrement aux risques psychosociaux sont parfois menés trop loin du terrain. Ces initiatives mettent aussi du temps à modifier la pratique quotidienne, ce qui est contre-productif en matière de ressenti des agents », explique Florence Carruel, présidente de l’Association nationale de médecine préventive des personnels territoriaux.
Des ajustements entre attentes et actions (voir le graphique n° 6) qui vont cependant être améliorés en ce qui concerne la protection sociale. Si, pour l’instant, 44 % des agents se disent insatisfaits de la qualité de leur couverture, 87 % d’entre eux voient comme prioritaire la réforme qui rendra obligatoire, dès le 1er janvier 2022, la participation financière des employeurs publics à la protection sociale.
Toujours attachés au service public
Comme l’an passé, 79 % des agents se déclarent satisfaits d’exercer dans la fonction publique, en particulier chez les agents des catégories A et B. Ceux de la catégorie C sont plus mesurés ; ils sont 22 % à se déclarer insatisfaits, soit une hausse de 4 points par rapport à l’année dernière. La fierté d’exercer son métier reste, en revanche, validée par 83 % des répondants.
La fatigue s’installe
Avec un taux de 3,6 sur 5, le niveau moyen de fatigue nerveuse augmente par rapport à 2020 (3,1/5). Les agents des catégories A et B éprouvent à 20 % et 19 % une fatigue nerveuse extrême, contre 24 % pour les C. En revanche, le niveau moyen de fatigue physique éprouvée (2,7/5) par les agents territoriaux baisse par rapport à 2020 (3,9/5).
Références
- Méthodologie : étude réalisée en ligne pour « La Gazette » et la MNT, du 23 août au 3 octobre, auprès de 4 800 agents de collectivités locales ; 18 % des répondants exercent dans une collectivité de 10 000 à 50 000 habitants, 47 % travaillent dans la filière de l’administration générale. Etude produite par Infopro Digital études (etudes@infopro-digital.com).
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