Le secteur funéraire est peu connu et est délaissé par les candidats à la fonction publique. « On entre dans le funéraire par hasard, on y reste par passion. » Cet adage, bien connu dans le milieu, illustre ce qui est arrivé à Jean-Christophe Peyroulet-Lamaison. A 17 ans, il trouve un job d’été : fossoyeur dans un cimetière en Corrèze. « C’est un travail de forçat mais ça forge un homme ! » se souvient-il.
Puis, il bifurque vers la maçonnerie et, en 2014, retour au cimetière. « La ville de Limoges cherchait un maçon fossoyeur, je savais déjà que je n’avais pas la crainte de la mort donc j’ai postulé », raconte-t-il.
Une grande technicité
Au quotidien, l’inhumation et l’exhumation occupent 40 % du temps. A l’aide d’une minipelle, il creuse les fosses des nouvelles tombes, ouvre les monuments et sort les cercueils avec délicatesse, en cas de procédure administrative, de rapatriement ou de réduction de corps.
L’entretien du cimetière représente 50 % du temps de travail et 10 % sont consacrés à l’aménagement : nettoyage des allées, installation de bancs ou columbarium, entretien des sépultures des bienfaiteurs de la ville etc. Autres missions : participer aux convois funéraires, conduire les véhicules…
« Psychologiquement, c’est très difficile, on tient entre quinze et vingt ans, avoue Ingrid Bourgeois-Muller, cheffe du service des cimetières et du centre funéraire de la ville de Mulhouse [3 200 agents, 108 900 hab.], dont le service a été très impacté par la crise sanitaire. C’est un métier difficile et exigeant, mal reconnu, qui nécessite d’être remis en lumière et soutenu. Même si c’est souvent mécanisé, il faut une technicité énorme pour creuser les fosses. Le secteur subit des difficultés de recrutement. »
Une habilitation est obligatoire
De son côté, Jean-Christophe Peyroulet-Lamaison reconnaît que « psychologiquement ça peut être usant. Mais voir un mort ne [lui] fait plus rien. Le plus dur, ce sont les gens tristes. »
Pour ce métier, une habilitation funéraire est obligatoire et dispensée par l’Union du pôle funéraire public. « Pour devenir fossoyeur, il faut obtenir une habilitation, qui requiert huit heures de formation sur la législation et la réglementation funéraire, ainsi que quatre heures sur l’hygiène et de sécurité, indique Eric Dreneau, directeur général délégué des pompes funèbres intercommunales de Tours métropole Val de Loire [22 communes, 1 656 agents, 299 900 hab.] et chargé de la formation à l’union. Ensuite, les fossoyeurs peuvent être embauchés soit par des collectivités, soit par des opérateurs funéraires publics et privés. »
« Il faut de la rigueur, ne pas être fainéant et être respectueux »
[Ludovic Frébourg, marbrier fossoyeur aux pompes funèbres intercommunales de Saint-Brieuc Armor agglomération (32 communes, 710 agents, 152 000 hab.)]
« Comme mon père et mon frère, je suis devenu fossoyeur, avec un premier contrat à 17 ans, et suis rentré aux pompes funèbres intercommunales de Saint-Brieuc en 2017. C’est une équipe de qualité, avec des agents jeunes. Pour ce métier, il faut de la rigueur, ne pas être fainéant et être respectueux. Dans les cimetières, pas question de mettre de la musique dans le camion ; on ne parle pas fort. On rencontre les endeuillés pour des problèmes techniques, mais on ne se mélange pas à eux. Les moments les plus durs sont les décès beaucoup trop prématurés. On a un cœur mais il faut savoir déconnecter. On apprend à prendre sur soi et ensuite ça devient une habitude. Quand les familles sont contentes et rassurées, elles nous envoient un petit mot, c’est la meilleure des reconnaissances. »
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