« Les Afghans n’ont pas disparu », rassure Delphine Rouilleault, directrice générale de France Terre d’Asile, qui a été impliquée dans l’accueil d’urgence de ces exilés, organisé par l’Etat avec une dizaine d’opérateurs associatifs. Ce « SAS de premier accueil » de quinze jours, comportait notamment une mise sous quarantaine sanitaire ainsi qu’une prise de contact avec l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII).
Elan de solidarité des communes
A l’époque, les maires EELV de Bordeaux, Grenoble, Lyon, Besançon ou Strasbourg, les premiers magistrats PS de Marseille, Tours, Clermont-Ferrand, Brest et Chambéry, les sans-étiquette à sensibilité de gauche aux manettes de Laval, Nancy, ou Rouen avaient tous clamé leur volonté d’accueillir les Afghans. Même à droite, des voix se sont fait entendre dans ce sens, comme celle de Gaël Perdriau, maire LR de Saint-Etienne.
Cependant, le délégué interministériel à l’accueil et à l’intégration des réfugiés (DIAIR), Alain Régnier, avait temporisé. Le 9 septembre, il rencontrait l’Association nationale des villes et territoires accueillants (ANVITA) pour expliquer que cette phase de premier accueil était une compétence totalement régalienne.
L’Etat toujours aux manettes
Désormais, les Afghans sont dans un autre circuit, lui aussi géré par l’Etat – le processus de la demande d’asile. Entretemps, des collectivités volontaires se sont questionnées : qu’advenait-il de ces Afghans ayant suscité l’émoi collectif à l’été ? « Le temps des communes est à venir. C’est encore le temps de l’Etat.
Ces personnes sont désormais accueillies dans le cadre du dispositif national d’accueil (DNA) », explique Delphine Rouilleault. Elles sont hébergées dans des Centre d’accueil de demandeurs d’asile (CADA), en région parisienne, dans le Grand-Est, en Bourgogne-Franche-Compté, mais également dans les métropoles comme Bordeaux ou Lyon.
L’exception faite pour les artistes
Zohra Amimi, conseillère municipale (SE) déléguée aux migrants à Rouen, nuance cette réalité : « Il y a 26 Afghans répartis dans des centres d’accueil de demandeurs d’asile (CADA) sur notre territoire. En revanche, nous prenons en charge directement quatre personnes issues du monde de la culture. Le Centre dramatique national a loué un grand appartement pour les loger. Moi, je m’occupe personnellement de leur demande d’asile et de leur intégration sociale. » Selon l’ANVITA, sur les 2700 Afghans initialement arrivés, environ 700 ont trouvé des solutions en dehors du DNA. En tout état de cause, ils attendent tous l’issue de leur demande d’asile. « Nous avons eu l’assurance de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFRPA) que leur demande d’asile sera traitée selon une procédure accélérée. Nous espérons son aboutissement pour début 2022 », affirme Delphine Rouilleault.
Le temps des communes arrivera bientôt
C’est probablement dans cette optique que le Délégué interministériel à l’hébergement et à l’accès au logement (DIHAL), Sylvain Mathieu, est venu rencontrer les adhérents d’ANVITA, le 19 octobre. Il les a sensibilisés sur la nécessité de trouver des logements pour ces Afghans, une fois leur statut de réfugiés obtenu. Parmi eux, environ 40% souhaiteraient rester en région parisienne, les 60% autres acceptant de partir en province.
« Il faut mobiliser les villes de plus de 7000 habitants, pour faciliter l’intégration professionnelle de ces personnes très diplômées », confie-t-on chez l’ANVITA. Ces communes sont donc appelées à commencer le recensement de logements inoccupés qui pourraient être mis à disposition des futurs réfugiés. Elles doivent en communiquer la liste aux préfets, qui s’engagent à répondre sous cinq jours. Le DIHAL aurait mis l’accent sur les solutions de type colocation solidaire car elles favorisent l’intégration linguistique et sociale des exilés.
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Migrants : comment les territoires ont pris le relais de l'Etat
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