« Ce moment de restitution des conclusions de la démarche « Habiter la France de demain » est très important pour moi. L’objectif est de produire une vision qui dépasse les contradictions car nous avons besoin de plus de logements, à des prix abordables, de plus de mixité, de nature en ville mais aussi de densification… Il faut réconcilier les points de vue en amont avec tous les acteurs» a martelé Emmanuelle Wargon, ministre déléguée chargée du Logement, qui intervenait à la cité de l’architecture et du patrimoine, à Paris, ce jeudi 14 octobre 2021 afin de donner ses orientations en matière d’habitat.
En février 2021, le ministère avait engagé un processus avec l’ensemble des parties prenantes, 80 citoyens lors d’une consultation publique, des élus locaux, des professionnels, promoteurs, aménageurs, architectes, urbanistes, chercheurs… pour faire émerger « l’habitat de demain écologique et désirable. »
L’intensité et la qualité des logements
Par la valorisation des exemples réussis de logements de qualité, avec de la mixité sociale et intergénérationnelle, avec des matériaux innovants, mais aussi par un dialogue engagé lors d’une consultation citoyenne, cette démarche devrait permettre de « construire une vision. ». Même si les divergences à surmonter sont parfois importantes. En effet, 75% des Français demeurent attachés à la maison individuelle. Or pour Emmanuelle Wargon « nous sommes face à une urgence climatique qui ne se négocie pas. Le modèle du pavillon avec jardin n’est pas soutenable et nous mène dans une impasse. »
Le modèle que souhaite construire la ministre repose sur deux piliers, l’intensité et la qualité. L’intensité fait référence à la densité urbaine qui doit permettre de rapprocher l’habitat, les services publics, le commerce et les transports. « C’est un changement de paradigme important. Car lors de la création des villes nouvelles l’habitat et les lieux de travail étaient éloignés» note Jean-Paul Jeandon, maire (PS) de Cergy-Pontoise (204 228 hab. Val d’Oise).
Concernant la qualité, « on construira plus parce que l’on construira mieux» considère Emmanuelle Wargon. La qualité touche au confort, à l’esthétique des logements mais aussi leur performance énergétique. L’architecte urbaniste François Leclerc a travaillé avec Laurent Girometti à construire un référentiel sur la qualité d’usage du logement. « Cet aspect est un des oubliés de la culture urbaine, note-t-il, mais la crise sanitaire a permis une prise conscience à ce sujet. La prise en compte de la notion de pièce à vivre, de la mutabilité des logements, de l’importance de la ventilation naturelle mais aussi des espaces extérieurs, tout cela contribue à améliorer la qualité du logement» juge-t-il.
Les enjeux de l’habitat durable
Cette démarche « habiter le France de demain » a permis de formaliser 10 enjeux, à la fois des mesures concrètes qui vont s’appliquer immédiatement ou d’autres qui vont être lancées rapidement. Une campagne de sensibilisation va être lancée pour que les citoyens puissent s’approprier les enjeux de l’habitat durable. « La décroissance du dispositif de défiscalisation Pinel+ est annoncée à l’échéance 2023 et 2024, a détaillé Emmanuelle Wargon, mais les taux actuels seront maintenus pour les opérations en quartiers prioritaires de la politique de la ville, mais aussi pour les logements précurseurs en matière de qualité environnementale et de qualité d’usage par rapport à la surface minimale, aux espaces extérieurs ou encore à la double orientation. Mais c’est encore en discussion. Le décret interviendra en fin de l’année. »
Autres axes évoqués : la requalification des entrées de ville, les liaisons entre zones pavillonnaires et les centres-villes mais aussi les contrats de relance du logement, les chartes locales de qualité des logements…
Produire plus de logements abordables est une des priorités évoquées, avec l’agrément pour la construction de 250 000 logements sociaux en deux ans, le développement du logement intermédiaire, et un dispositif « louer abordable » qui sera présenté en novembre prochain.
Alors l’habitat de demain sera-t-il écologique et désirable ? Emmanuelle Wargon semble y travailler. Juste une interrogation demeure. Quel avenir pour ces propositions à six mois de l’élection présidentielle ?
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Penser le logement autrement
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- Penser le logement autrement
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