Sans surprise, la Cour des comptes veut le retour de la contractualisation. Dans son dernier rapport sur la stratégie des finances publiques pour la sortie de crise, elle préconise de « développer la contractualisation pluriannuelle sur les objectifs et les moyens, en contrepartie d’une plus grande liberté de gestion » afin « de renforcer l’efficience et d’améliorer la qualité des services rendus aux citoyens par l’ensemble des collectivités territoriales et des administrations publiques ».
Recettes classiques
Le document, attendu en avril mais finalement présenté mardi 15 juin au Premier ministre et au Président de la République pour cause de confinement, reprend largement ses préconisations formulées ces dernières années sur la réduction de la dette, la gouvernance des finances publiques et sur l’efficience des services publics locaux.
Spécifiquement sur la dette covid, la Cour emprunte les pistes évoquées par l’ancien ministre Jean Arthuis dans son rapport du 18 mars dernier sur la réduction de la dette publique, notamment, le retour de la contractualisation, la revue des missions de toutes les administrations publiques, y compris locales, ou la généralisation de l’évaluation des politiques publiques.
Comme le comité d’expert réuni autour de Jean Arthuis, la Cour des comptes enjoint l’Etat à impliquer les collectivités dans la réduction de la dette covid qu’elles n’ont que peu contribué à creuser. Malgré des dépenses supplémentaires en 2020 évaluées à 4 milliards d’euros par le député LRM Jean-René Cazeneuve ministre délégué chargé des Comptes publics, Olivier Dussopt constatait le 18 mai dernier devant les députés que « les collectivités territoriales sont les acteurs publics qui ont le mieux résisté face à cette crise.
Leur solde est quasiment à l’équilibre fin 2020 quand l’État est en déficit de 7,9 % du PIB et les administrations de sécurité sociale de 2,1 % du PIB ». Dans le détail, une part, marginale, du déficit de l’Etat vient aussi des mesures de soutien aux collectivités, évaluées autour de 4 milliards, nets des avances remboursables.
Prendre aux plus riches… ou aux moins pauvres
La tentation sera grande au futur exécutif élu après les élections présidentielles, d’aller taper dans la caisse des administrations les plus riches ou plutôt les moins endettées à l’issue de la crise, comme le récent passé de la baisse des dotations l’a montré. Or, le gouvernement compte aussi beaucoup sur les collectivités pour relancer la machine économique via leurs investissements.
Ceux-là même qui seront immanquablement amputés dès que l’épargne brute du secteur local fléchira. Pour éviter cet écueil, Edouard Philippe avait proposé des contrats sur une évolution de la dépense, avec un très relatif succès, a rappelé la même cour des comptes dans un rapport publié en septembre 2018.
Aujourd’hui les Sages de la rue Cambon semblent rejoindre les conclusions du rapport Arthuis pour compléter le dispositif de contractualisation par une réforme de la gouvernance des finances publiques. Celle-ci passerait notamment par la définition de « trajectoires de moyen terme comportant des enveloppes pluriannuelles de dépenses et de mesures nouvelles en recettes ».
Après la crise sanitaire et la réforme fiscale, le fruit semble presque mur. La contractualisation permet de contrôler les dépenses locales tandis que la recentralisation presque aboutie de la fiscalité locale assure celui des recettes. Tout est donc presque en place pour enrôler les collectivités dans la réduction de la dette publique, à marche forcée.
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