Cela ne vous aura pas échappé cette nouvelle réglementation a pris une dimension environnementale que ne possédait pas la précédente. Le secteur du bâtiment est un de ceux dont le bilan carbone est le plus mauvais. Situé juste derrière le secteur des transports, il est celui qui produit le plus de gaz à effet de serre. La décarbonation de ce secteur, qui représente environ 25 % des émissions nationales, est donc un véritable enjeu qui conditionne l’atteinte de la neutralité carbone visée pour 2050.
Construire le plus décarboné possible
La RE 2020 se décline autour de trois objectifs qui la distinguent radicalement de la RT2012.
Le premier objectif est presque une évidence, il s’agira de construire des bâtiments qui consomment moins et utilisent des énergies moins carbonées. Les exigences du besoin bioclimatique (appelé Bbio) se trouvent ainsi renforcées. Le futur Bbio devrait être inférieur de 30 % à celui de la RT 2012. Mais l’effort des constructeurs est rude, et beaucoup d’entre eux dénoncent de nombreux surcoûts de construction en découlant.
Le Bbio, qu’est-ce que c’est ?
Apparu avec la RT 2012, cet indicateur a pour objectif de valoriser les conceptions bioclimatiques. Il s’appuie essentiellement sur les caractéristiques du site de construction et de leur emploi pour consommer moins d’énergie, tout en permettant de préserver un bon confort pour les occupants. En d’autre terme il évalue la performance thermique du bâtiment sans ses systèmes consommant de l’énergie.
Le second objectif consiste à ménager une transition progressive vers des constructions bas-carbone, misant sur la diversité des modes constructifs et la mixité des matériaux. La RE 2020 encourage le stockage du carbone en utilisant l’analyse du cycle de vie (ACV) prévu par la loi Elan. Cette méthode prend en compte toutes les émissions de carbone, leur stockage et leur restitution dans l’atmosphère tout au long de la vie d’un bâtiment, de sa conception à sa déconstruction. Ainsi, les gaz à effet de serre (GES) responsables du réchauffement climatique sont mieux pris en compte. Cette méthode permet ainsi d’anticiper les effets des GES produits dans les années à venir. Elle inscrit la RE 2020 dans une logique de résultat puisqu’elle permet de confronter les valeurs obtenues aux seuils définis.
Matériaux biosourcés
Les choix des matériaux et des solutions constructives seront ainsi orientés vers les moins carbonés. Il faut donc s’attendre à un certain bouleversement des pratiques constructives avec de plus nombreux recours au bois et aux matériaux bio-sourcés. Actuellement les constructions à structure bois représentent à peine 10 % des projets. Cette solution technique sera à coup sur la grande gagnante de cette évolution mais si elle va s’approprier d’importantes parts de marché dans les prochaines années, elle ne va pas supplanter les solutions bétons qui présentent de solides qualités techniques et socio-économiques. Et si son positionnement environnemental pêche actuellement, la recherche dans ce secteur promet de nouveaux produits à venir plus vertueux.
Il est probable que les solutions constructives de demain seront des solutions mixtes faisant appel à des ciments très bas carbone avec de nombreux éléments préfabriqués. L’atteinte des exigences fixées par la RE 2020 est progressive pour que toutes les branches de l’industrie du bâtiment se mettent en situation pour produire tous ces nouveaux produits et permettre de construire le plus décarboné possible.
Seuils maxi admissibles exprimés en kgCO2/m²/an
1er janvier 2022 | 2025 | 2028 | 2031 | |
Maisons individuelles | 4 | 4 | 4 | 4 |
Logements collectifs | 14 | 6,5 | 6,5 | 6,5 |
Dont réseaux de chaleurs urbains | 14 | 8 | 6,5* | 6,5 |
* une disposition dérogatoire permet de prendre en compte non pas le contenu carbone de la chaleur du réseau à la date du dépôt de permis de construire, mais le contenu carbone prospectif du réseau prorogeant ainsi l’atteinte de ce seuil.
Le troisième objectif est presque surprenant puisqu’il réhabilite une notion de confort dénoncée a priori comme énergivore : le rafraîchissement des locaux en été. Mais préserver le confort d’été ne signifie pas forcément multiplier les équipements de climatisation qui demeurent une solution énergivore. Il existe par contre des principes de conception qui permettent d’obtenir sans consommation d’énergie des températures intérieures supportables en période de canicule.
Outre ces trois objectifs, un calendrier d’entrée en vigueur est aussi annoncé. Si les logements, qui représentent la majorité des projets, seront concernés dès le 1er janvier prochain, l’application aux bureaux et établissements d’enseignement est annoncée pour la 1er juillet 2022. Puis ce sera au tour des autres bâtiments du secteur tertiaire de s’aligner sur ces nouvelles mesures.
D’autres échéances sont prévues pour le déploiement de la RE 2020. Chacune de ces étapes verra un renforcement des exigences pour atteindre la neutralité carbone en 2050. Mais ces paliers ne concernent que l’habitat.
Et l’existant ?
Rien ne s’impose à lui mais il sera amené à évoluer au fil des rénovations et c’est à ce moment-là que les effets de la RE 2020 se feront sentir.
En premier lieu, les systèmes de chauffage qui utilisent une énergie fossile (gaz naturel, fuel, charbon) sont appelés à disparaître. Ce type d’appareil ne sera plus commercialisé et les pièces de rechange ne se trouveront que jusqu’à l’épuisement des stocks. En fin de vie, ils seront remplacés par des systèmes utilisant des énergies renouvelables.
En second lieu, les consommateurs seront incités à consommer de l’électricité provenant d’une énergie renouvelable. Cette évolution n’entraînant pas nécessairement de travaux puisqu’il suffira d’opter pour des contrats de fourniture garantissant une provenance renouvelable (éolien, photovoltaïque, hydraulique).
Les rénovation-extensions devront tenir compte des nouvelles exigences de la RE 2020 au même titre que les constructions nouvelles. Il faut donc s’attendre à rencontrer beaucoup plus de matériaux biosourcés dans le cadre des opérations lourdes destinées à réhabiliter les bâtiments existants. Plus d’isolants d’origine végétale ou animale, plus de bois également sur les futurs chantiers, de la pierre ou de la terre crue pour construire les murs des extensions. Ces solutions considérées comme alternatives il y a encore quelques années, sont regardées avec intérêt et revêtent désormais une image novatrice.
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