Réponse du ministère de l’économie, des finances et de la relance : L’article 392 de la directive n° 2006/112/UE relative au système commun de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) autorise les États membres à taxer sur la marge les livraisons de bâtiments et de terrains à bâtir achetés en vue de la revente par un assujetti qui n’a pas eu droit à déduction à l’occasion de l’acquisition.
Cette faculté transposée par la France à l’article 268 du code général des impôts (CGI), constitue une dérogation au principe selon lequel la TVA doit normalement s’appliquer sur le prix total de la vente. La mise en œuvre de ce régime dérogatoire de taxation suppose que le bien revendu soit identique au bien acquis quant à sa qualification juridique.
En conséquence, la mesure qui conduirait notamment à appliquer le régime de la marge lorsqu’un opérateur acquiert un immeuble bâti, puis procède à sa destruction avant de le revendre en tant que terrain à bâtir, serait critiquable sur le plan de sa conformité au droit de l’Union européenne régissant la TVA.
Au demeurant, la condition d’identité juridique a été confirmée par le Conseil d’État dans une décision rendue le 27 mars 2020 (n° 428234, « Promialp »).
En tout état de cause, étendre le régime de taxation sur marge à des opérations immobilières qui n’y sont pas éligibles entraînerait une érosion substantielle de l’assiette de la TVA et, par voie de conséquence, une perte de recettes pour l’État.
En outre, le Conseil d’État a estimé nécessaire de saisir la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) d’une question préjudicielle relative à l’interprétation de l’article 392 de la directive TVA notamment s’agissant de la notion de terrain à bâtir dans les deux cas suivants :
- lorsque des terrains acquis non bâtis, sont devenus, entre le moment de leur acquisition et celui de leur revente par l’assujetti, des terrains à bâtir ;
- lorsque ces terrains ont fait l’objet, entre le moment de leur acquisition et celui de leur revente par l’assujetti, de modifications de leurs caractéristiques telles que leur division en lots ou la réalisation de travaux permettant leur desserte par divers réseaux (voirie, eau potable, électricité, gaz, assainissement, télécommunications).
Dans cette affaire (question préjudicielle C-299/20, « Icade Promotion Logement », sur renvoi préjudiciel du Conseil d’État n° 416727 du 25 juin 2020), la Cour aura ainsi à se prononcer sur la nécessité d’une identité juridique ou matérielle entre le bien acquis et le bien revendu pour l’application du régime de taxation sur la marge.
En tout état de cause, comme l’interprétation que la Cour formulera s’imposera à tous les États membres qui ont recours au dispositif de l’article 392 de la directive TVA, il n’est pas envisagé de faire évoluer le dispositif de taxation sur la marge des opérations immobilières dans l’intervalle.
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