De cado, cadere : tomber, en latin. Le dictionnaire Littré définit la déchéance comme l’action de déchoir. Il y a la déchéance infligée par la nature : le dépérissement d’une personne, « la décrépitude morale ou physique due à l’âge ou à la maladie » (Académie française).
Il y a la déchéance due à la mauvaise fortune : la perte d’une réputation, l’avilissement, la ruine, « le dernier degré de la misère et de l’abjection » (Émile Zola).
Il y a la déchéance ordonnée par les hommes, « l’action de faire déchoir » (Académie française). Un châtiment prononcé par les pairs qui place dans un état inférieur à celui dans lequel une personne se trouvait : privation d’un privilège, d’un rang ou d’un poste, destitution d’une fonction officielle, perte légale ou retrait d’un droit. Sur l’échelle des sanctions, les articles 25 et 25-1 du code civil prévoient une peine de déchéance de nationalité à l’encontre de personnes naturalisées, binationales, qui commettraient des actes contre la France.
Est-ce à voir avec les anges déchus envoyés en Enfer ? Le mot renvoie à des images négatives, humiliantes, honteuses : l’échec, l’exclusion, la relégation, la souffrance, la mort. Appliquée à la nationalité, la déchéance est archaïque : elle est le bannissement de l’Ancien régime, qui rejette la personne hors de la communauté nationale et la prive de ses droits de citoyen. « Être déchu de sa citoyenneté, écrivait Hannah Arendt, c’est être privé de son appartenance au monde ; c’est comme revenir à l’état sauvage, à l’état d’homme des cavernes…
Un homme réduit à cette seule condition d’homme perd jusqu’aux qualités qui permettent aux autres de le reconnaître comme un des leurs… Il peut vivre et mourir sans laisser de trace, sans porter la moindre contribution au monde commun. » La prononcer, c’est déchoir politiquement : un artifice de bonne conscience collective pour éjecter les problèmes hors de la société et se dispenser de rechercher les moyens de la réformer.
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