Décidément, en cette période de crise, tout change très vite. Il y a quelques semaines encore, le gouvernement se félicitait, par la voix de la ministre de la Cohésion des territoires, Jacqueline Gourault, « de la bonne résistance des finances locales en 2020, avec une hausse des recettes de 1,3 % pour des dépenses à + 0,4 % ». L’épargne brute ne baissait pas, il n’y avait plus qu’à foncer dans le plan de relance : « C’est peut-être un peu difficile à entendre », ironisait alors la ministre à l’adresse des associations d’élus « qui ont crié avant d’avoir mal », reprend Olivier Dussopt, le ministre délégué chargé des Comptes publics. Mais, une fois ces chiffres consolidés, il apparaît que, si « les finances locales résistent bien » par rapport à celles de la Sécurité sociale et de l’Etat, elles subissent, en effet, un début d’effet ciseaux, c’est-à-dire une légère hausse – de 0,2 % des dépenses réelles de fonctionnement – couplée à une chute concomitante des recettes réelles de fonctionnement. Celles-ci plongent même de 1,4 %, soit – 2,7 points par rapport à la première estimation. Une analyse que ne partage pas totalement Jean-René Cazeneuve, président (LREM) de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation de l’Assemblée nationale. « Il peut y avoir un effet ciseaux sur certains départements, métropoles et EPCI, mais pas au niveau national. »
Perte tarifaire
En tout cas, cet écart n’est pas de nature à déclarer l’état d’urgence, puisque l’épargne brute des collectivités retrouve son niveau de 2018 à 31 milliards d’euros. Et donne un léger souffle aux craintes des associations d’élus sans les renforcer, sauf pour le bloc local. Leurs associations, qui trouvaient « difficile à entendre » les premières estimations de l’Etat, avaient de suite dénoncé une « globalisation trompeuse des données du bloc communal ». Aujourd’hui, comme elles l’avaient prévu, les pertes tarifaires des communes ont bien plongé de 13,9 % (1,8 milliard). Or, si « ces recettes ne représentent en moyenne que 6 % des recettes réelles de fonctionnement, elles constituent 40 % de l’épargne brute », rappelle Christian Escallier, directeur général du cabinet Michel Klopfer.
L’intégration de ces pertes dans le calcul change donc la donne et remonte, de facto, le niveau de danger. De son côté, Jean-René Cazeneuve n’en démord pas : « L’impact de la crise est tout de même limité dans son ampleur sur la capacité d’autofinancement, qui prouve que les finances locales sont très résilientes et que les actions de soutien ont permis d’amortir le choc. »
Tout le monde partage, en revanche, le même constat : il y a une grande hétérogénéité des conséquences financières sur les territoires. « Globalement, la crise sanitaire de 2020 a impacté d’une manière marginale les finances communales des petites communes, sauf pour celles touristiques », note Dominique Dhumeaux, vice-président délégué de l’Association des maires ruraux de France et maire de Fercé-sur-Sarthe. D’autres collectivités pourraient avoir moins de chance, comme les autorités organisatrices de la mobilité qui s’inquiètent des conséquences financières de la défection continue des usagers pour les transports en commun. « C’est une très grosse difficulté financière pour ces intercommunalités qui n’ont pas été traitées de façon juste et équitable par le gouvernement », estime Sébastien Miossec, président délégué de l’Assemblée des communautés de France et président (PS) de Quimperlé communauté.
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Gazette des Communes, Club Finances
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