La France serait-elle timide en matière de recensement des représentants d’intérêts ? Ou préfère-t-elle mettre la poussière sous le tapis pour éviter de montrer que la décision publique est parfois prise sous influence ? Trois ans après la promulgation de la loi « Sapin 2 » du 9 décembre 2016, qui a notamment créé le répertoire des représentants d’intérêts, le bilan de l’activité 2019 des lobbys en France que vient de publier la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) n’aide pas à entonner un cocorico.
Déclarations améliorées
Les chiffres communiqués par la haute autorité font état de 2 179 représentants d’intérêts inscrits, soit une hausse de 16 %, depuis le dernier bilan établi en mai 2019. En revanche, ils ne sont pas tous à jour de leurs obligations déclaratives (167 représentants d’intérêts d’entre eux seraient concernés). Dans son bilan, la haute autorité précise qu’elle prévoit de faire usage de la procédure de mise en demeure prévue pa la loi à l’encontre de ceux qui ne régulariseraient pas leur situation. Elle constate dans le même temps une amélioration de la qualité des déclarations déposées. Elle note ainsi que « les représentants d’intérêts ont déclaré près de 13 000 actions pour l’exercice 2019, contre moins de 8 500 pour l’exercice 2018 ». La HATVP fait aussi état d’une meilleure clarté et visibilité pour les fiches d’activités remplies par les lobbys (70 % des objets déclarés ont été jugés conformes aux spécifications minimales publiées par la haute autorité, contre 61 % l’année précédente).
Identification difficile
Mais il serait faux de croire que le bilan d’activités 2019 des lobbys est encourageant. Tout d’abord, parce que le caractère public de ce répertoire incite les représentants d’intérêts à déclarer sous le nom de filiales moins connues des montants par conséquent moins visibles. Ensuite, les experts du lobbying sont unanimes pour dire que ce dernier s’effectue aussi de manière indirecte, par l’intermédiaire de cabinets spécialisés, qu’ils soient de relations publiques, de conseil ou encore d’avocats. Or, la loi n’impose pas à ces cabinets de dévoiler le nom de leurs clients, ce qui accentue la difficulté pour savoir qui sont les représentants d’intérêts.
Enfin, et la HATVP le souligne elle-même dans son bilan, l’utilisation de la rubrique « observations » n’est remplie que dans 20 % des cas. Or, cette rubrique permettrait de savoir quelles actions ont été menées par les lobbys. Car après la question « de qui », vient la question « du comment ».
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