Forte d’une petite centaine d’exemples – une douzaine de « changements majeurs », tel le transfert du pays de Gex, dans l’Ain, vers la Haute-Savoie, et près de 80 « changements mineurs », principalement des transferts de certaines communes limitrophes vers un département voisin –, la tribune de Laurent Chalard, docteur en géographie, intitulée « Décentralisation : pour un redécoupage des départements français », et publiée sur le site « atlantico.fr » fin mai 2020, n’est pas passée inaperçue. Si peu de médias nationaux s’en sont fait l’écho, rares sont les quotidiens régionaux à ne pas avoir profité de ces propositions iconoclastes, voire impertinentes, pour interroger élus locaux et populations. De « Ouest-France » à « Nice-Matin », de « La Dépêche du Midi » au « Dauphiné libéré » en passant par « Le Journal du Centre », dans chaque territoire, la question « et si on revoyait les frontières du département [voisin] ? » ouvrait le champ des possibles.
C’est que, au-delà des propositions de transferts de communes limitrophes, le géographe constate que le département, tel un phénix des territoires, cent fois mort et enterré durant les dix dernières années de réformes territoriales qui ont vu les intercommunalités et les régions doubler de volume, en sort finalement renforcé, toujours vivant, toujours débout, encore plus après la crise sanitaire qui a montré sa pertinence. La table ronde que prévoyait l’Assemblée des départements de France lors de son congrès de novembre – finalement reporté à 2021 –, « les départements : 230 ans de proximité et la construction d’une démocratie enracinée, décentralisée », affirmait le poids historique de l’institution. La réflexion sur l’avenir de cet échelon apparaît plus que jamais nécessaire.
Dans quel état se trouvent les départements, après un cycle de réformes qui a vu la réorganisation et le renforcement des intercommunalités, l’agrandissement des régions et la multiplication des communes nouvelles ?
Les départements ont été mis à mal par les réformes successives. Ils ont perdu des compétences et, surtout, on a remis en cause leur pertinence en tant qu’échelon territorial. C’est une image très ancrée chez les décideurs des élites parisiennes qui pensent que le département est archaïque et ne sert plus à rien, qu’il est clientéliste dans son fonctionnement. Longtemps, on a pensé qu’il était en sursis et amené à disparaître. Aujourd’hui, il faut être plus modéré. Le département reste la brique de base des services de l’Etat. Quand il y a des inondations, une pandémie, l’Etat s’appuie sur les préfets. Certes, le conseil départemental a perdu la clause générale de compétence, mais il faut relativiser. Même s’il est souvent réduit aux compétences sociales, cela reste un domaine primordial. Quant à l’aménagement du territoire, n’oublions pas que le réseau des routes départementales est le réseau principal aménagé. Qui construit de nouvelles deux fois deux voies ? C’est le département ! L’Etat n’investit presque plus.
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