Alors que des tiers-lieux ont été contraints à fermer leurs portes pendant le confinement faute de pouvoir accueillir du public, nombre d’acteurs de « fab labs » (mettant à disposition machines et outils) se sont mobilisés pour fabriquer et distribuer des visières, masques, respirateurs… Sans compter les systèmes de drive ou de distribution de repas solidaires hébergés dans ces locaux. « Le mouvement des makers a fait la démonstration éclatante pendant le confinement de l’engagement de ces acteurs et de la nécessité de l’action de proximité », se félicite Patrick Levy-Waitz, auteur en 2018 d’un rapport sur les tiers-lieux en France et désormais président de l’association France Tiers-lieux, bras armé du gouvernement pour assurer le développement de ces espaces.
Valeurs de l’économie sociale et solidaire
Un constat qui a accru l’intérêt des collectivités pour les tiers-lieux, qu’il s’agisse d’espaces de travail partagé ou de fab labs. La région Occitanie en fait ainsi l’un des outils de mise en œuvre de sa stratégie de territoire pour 2040. « Une réflexion engagée un peu avant la crise, mais qui s’est accélérée. Il s’agit de rééquilibrer une région dont l’attractivité se concentre sur les métropoles et le littoral, et d’accompagner d’autres territoires au potentiel intéressant à dynamiser leur développement local », explique Sandrine Issa-Sayegh, chargée de mission à la direction de l’aménagement, du foncier et de l’urbanisme de la région. L’action du conseil régional vise à accompagner les territoires depuis la conception d’un projet jusqu’au financement de postes d’animateurs et à la labellisation des tiers-lieux.
Forte de 260 espaces, la région Nouvelle-Aquitaine entend renforcer son maillage territorial en soutenant l’implantation de ces lieux dans les territoires ruraux et périurbains. Objectif : que chaque citoyen soit à moins de vingt minutes d’un tiers-lieu. « Sont particulièrement ciblés les territoires les plus fragiles en matière d’indicateurs socioéconomiques. Les projets que nous soutenons doivent défendre les valeurs de l’économie sociale et solidaire : des espaces de travail partagés accessibles à tous, y compris en termes de tarifs, et qui favorisent l’implication des acteurs », note Eugénie Michardière, chargée de mission « tiers-lieux, inclusion numérique et e-santé ».
Tirant les leçons du confinement, la Cellule, espace de coworking, portée par la communauté de communes de Sor et Agout (CC, 26 communes, 22 700 hab., Tarn) et essentiellement orientée jusqu’ici sur l’accueil d’entrepreneurs et de commerciaux de passage, ainsi que sur l’insertion numérique, pense renforcer à l’avenir son ouverture au télétravail, anticipant de nouvelles attentes de la part des entreprises toulousaines et des navetteurs habitant le territoire. Espaces hébergeant à la fois des actions culturelles, économiques et d’inclusion numérique, les tiers-lieux ont toujours eu dans leur ADN une dimension hybride. Un caractère que la crise sanitaire a renforcé. « Ils ont aujourd’hui à répondre à des enjeux majeurs, comme soutenir les circuits courts, le recyclage… » avance Patrick Levy-Waitz. Les projets agricoles ou à composante sociale deviennent ainsi plus nombreux, l’accueil d’étudiants pouvant y suivre à distance leurs cours est également envisagé.
Forces de proposition
Gérante de La coopérative tiers-lieux, le réseau régional de la Nouvelle-Aquitaine, Lucile Aigron souhaiterait capitaliser sur les actions menées avec les établissements sanitaires lors du confinement : « Il nous semble intéressant de préserver ce lien entre les établissements sanitaires et les lieux de prototypage, qui peuvent s’avérer des forces de proposition, par exemple pour adapter du matériel destiné à des personnes en situation de handicap. C’est un chantier que nous souhaiterions porter en associant l’agence régionale de santé, les centres hospitaliers, les associations médicosociales, etc. »
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