Avec plus de 100 milliards d’euros de marchés par an, la commande publique, longtemps considérée comme une matière avant tout technique et juridique, fait aujourd’hui figure d’outil stratégique, quasi magique, sans même parler de sa force de frappe économique. Ses missions donnent le tournis : développer l’emploi, soutenir l’économie locale au travers des TPE-PME, remettre au travail des personnes en difficulté, innover, manger mieux, lutter contre le réchauffement climatique… Bref, sauver le monde, ou presque ! Mais en a-t-elle vraiment les moyens ?
Sur le terrain, le volontarisme est de mise. S’il fallait se contenter d’un seul exemple, la tenue des Jeux olympiques à Paris en 2024 se veut emblématique. Sur les 47 chantiers prévus, le comité d’organisation va réserver 25 % du montant global de la commande publique à des TPE-PME et aux structures de l’économie sociale et solidaire, et 10 % des heures travaillées à l’insertion, dans des secteurs aussi divers que la construction, l’événementiel, la sécurité privée, la restauration, l’accueil…
Accélération du mouvement
Toutefois, sur le papier, les chiffres restent têtus. Certes, ils progressent, mais encore trop lentement. Qu’il s’agisse des clauses sociales ou du volet environnemental de la commande publique, les objectifs qui avaient été fixés pour 2020 par le Plan national d’action des achats publics durables de 2014 ne seront pas atteints, et loin s’en faut. « Ces leviers sont exploités, mais pas suffisamment », reconnaît Laure Bédier, directrice des affaires juridiques de Bercy, qui plaide pour une accélération du mouvement, que ce soit en faveur des PME, de l’emploi des plus précaires ou du développement durable.
Au cœur du processus, l’acheteur public, en pleine mutation culturelle, a dû assimiler à marche forcée les nombreuses réformes de ces dernières années, rassemblées depuis peu dans le tout nouveau code de la commande publique, passer l’étape de la dématérialisation, intégrer les derniers décrets parus sur l’innovation ou le relèvement des seuils, digérer l’évolution de la jurisprudence… Il a gagné en maturité. « Il s’est professionnalisé », comme l’exprime Laure Bédier. Néanmoins, il lui faudra sans doute encore un peu de temps pour tirer le meilleur parti possible de sa nouvelle « boîte à outils », c’est-à-dire réaliser l’achat le plus avantageux possible pour sa collectivité en tenant compte de toutes ces nouvelles externalités, et satisfaire la volonté affichée des élus de soutenir leur tissu local.
Le tout en respectant, bien sûr, l’ensemble des principes de la commande publique : libre accès des candidats aux marchés, transparence et égalité de traitement. Une gageure !
Cet article est en relation avec le dossier
Cet article fait partie du Dossier
Emploi, environnement, social : le triptyque vertueux des marchés publics
1 / 5
article suivantSommaire du dossier
- Emploi, social, environnement : le triptyque vertueux des marchés publics
- Marchés publics : les PME, un vivier à courtiser pour doper l’économie locale
- Marchés publics : petit à petit, la clause sociale fait son nid
- Des solutions pour verdir les marchés publics
- Marchés publics : « L’objectif final, c’est le changement de l’entreprise »
Domaines juridiques