La circulaire « Castaner » secoue le monde politique depuis quelques jours : le ministre de l’intérieur a envoyé aux préfets ses nouvelles instructions sur le nuançage des élus et des listes candidats aux prochaines élections municipales des 15 et 22 mars.
On peut lire dans le texte (non publié, mais qui a fuité ici) que dorénavant, les communes de moins de 9000 habitants sont dispensées de nuançage politique d’office opéré par les préfets. Cette pratique, pas si récente puisqu’elle date de 2001, a bien évolué : au départ à 3500, le seuil passait à 1000 en 2014. Aujourd’hui, il est à 9000.
La fin du nuançage d’office, mais avec un seuil à 3500 habitants, avait d’ailleurs fait l’objet d’un amendement, par la suite supprimé, dans le projet de loi Engagement et proximité.
Si elle réjouit l’Association des maires ruraux de France, cette circulaire a aussi provoqué une véritable levée de bouclier, en particulier chez Les Républicains : deux élus locaux LR, Elisabeth Laroche et Alexandre Nanchi, ont formé un recours en référé devant le Conseil d’État.
Deux motifs juridiques
Pour Henri de Beauregard, leur avocat, cette circulaire pose un premier problème : « elle modifie des règles qui avaient été édictées par un décret. Du point de vue de la hiérarchie des normes, c’est illégal ».
Le deuxième problème, c’est, toujours selon cet avocat, « une erreur manifeste d’appréciation commise par le ministre, au regard du droit à l’information des citoyens sur l’état réel et effectif du paysage politique ». Ce droit, que l’on retrouve dans un décret du 10 décembre 2014, permet de donner à n’importe qui communication sur simple demande de diverses informations sur les candidats aux élections, et notamment la nuance politique attribuée au candidat par l’administration. « En rehaussant le seuil à 9000 habitants, cette circulaire prive alors le citoyen d’informations pour 96% des communes ».
Les scores de LREM grossis artificiellement ?
Ce n’est pas seulement le rehaussement à 9000 habitants qui coince. Henri de Beauregard, également président de la Haute autorité des Républicains, a aussi dans le viseur la nuance « liste divers centre » (LDVC). Cette catégorie « regroupe de manière inédite » plusieurs partis, parmi lesquels LREM, l’UDI, le Modem et Agir : c’est alors « transposer au niveau local une majorité présidentielle ». De plus, dès lors qu’une liste reçoit le soutien de l’un de ces partis, elle est automatiquement assimilée à la nuance LDVC. Pour Maître de Beauregard, « cela permet à LREM de s’attribuer n’importe quelle liste et de biaiser de manière assez sensible les résultats des élections ».
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