La responsabilité administrative du fait de la police des baignades et des activités nautiques peut s’avérer très lourde pour les communes littorales. Cette police municipale, qui s’exerce dans la fameuse bande marine des 300 mètres, trouve son fondement dans l’article L. 2213-23 du Code général des collectivités territoriales :
«(…) Le maire délimite une ou plusieurs zones surveillées dans les parties du littoral présentant une garantie suffisante pour la sécurité des baignades (…). Hors des zones et des périodes ainsi définies, les baignades et activités nautiques sont pratiquées aux risques et périls des intéressés. Le maire est tenu d’informer le public par une publicité appropriée (…)».
On sait que l’existence de zones délimitées pour des baignades surveillées ne dégage pas les communes de leur responsabilité s’agissant des accidents survenus en dehors de ces zones (1). Dans ce cadre, comme le souligne le Conseil d’Etat dans sa décision du 22 novembre 2019, « il incombe au maire d’une commune sur le territoire de laquelle sont situés des lieux de baignade qui, en dehors des zones surveillées délimitées à cet effet, sont fréquentés par des baigneurs et par des pratiquants de sports nautiques comme le surf, de prendre les mesures de publicité appropriées pour signaler la réglementation applicable et les dangers qui excèderaient ceux contre lesquels les intéressés doivent normalement se prémunir »(2).
Ainsi, l’absence de signalisation de forts courants sur une plage où la fréquentation est importante peut constituer une faute de nature à engager la responsabilité communale. De même, un panneau signalant que la baignade est dangereuse et interdite, mais mal positionné (visible par les seules personnes quittant la plage) caractérise une faute dans la mise en œuvre de la police des baignades (3).
Dans l’affaire du 22 novembre 2019, l’information municipale ne mentionnait pas spécifiquement le risque lié aux requins sur le territoire maritime de la commune de Saint-Leu à La Réunion, ce qui n’a pas été jugé illégal (malgré l’importance des préjudices). Une lecture trop rapide de la décision pourrait laisser croire qu’une interdiction de baignade assortie de la mention « danger » peut désormais suffire en toutes circonstances. Ce serait méconnaître le principe, constamment rappelé, selon lequel les dangers excédant ceux contre lesquels les intéressés doivent normalement se prémunir doivent être signalés. La nature des risques encourus doit être connue !
Les circonstances locales réunionnaises permettaient de relativiser la généralité de l’information fournie : la menace liée à l’attaque de requins était très largement connue et les juges ont relevé que la victime était un surfeur expérimenté connaissant les lieux. Ainsi, il serait bien aventureux de considérer l’arrêt du 22 novembre 2019 comme un revirement ; vu les risques contentieux, on ne peut qu’inciter les maires à préciser clairement les dangers des sites de baignade fréquentés par le public.
Domaines juridiques
Notes
Note 01 CE, 9 févr. 1966, Ville du Touquet-Paris Plage, Rec. Lebon, p. 91. Retour au texte
Note 02 CE, 22 nov. 2019, M. et Mme A…, n° 422655 Retour au texte
Note 03 TA Poitiers, 7 févr. 2019, M. Philippe N…, n° 1702831. Retour au texte