Votre Club des directeurs de sécurité des entreprises organise le 17 décembre à Paris son colloque annuel sur le thème des territoires. Vous avez convié les représentants des associations d’élus. En quoi les collectivités sont-elles concernées ?
Tous les acteurs, publics et privés, sont aujourd’hui concernés et même impliqués dans la politique de sécurité. La conception selon laquelle la sécurité relève exclusivement de l’Etat appartient au passé. Qu’il s’agisse de la police nationale, de la gendarmerie nationale, de l’armée, des polices municipales ou des agents de sécurité privée, chacun se sent désormais en responsabilité propre avec ses propres moyens. L’Etat reste un acteur majeur mais les collectivités sont devenues incontournables, avec leur vidéosurveillance et leurs services de police municipale.
Notre colloque annuel a l’ambition de réunir chacun des maillons de ce « continuum de sécurité ». Et nous allons nous rendre compte que nous parlons tous le même langage, que les moyens investis sont comparables et que les expertises professionnelles sont toutes très élevées.
Vous insistez également sur l’attractivité économique de la sécurité ?
Oui, car les citoyens sont à la fois les électeurs et les habitants des uns, mais aussi les clients et les salariés des autres.
Les collectivités perçoivent assez clairement que la sécurité est un investissement à la rentabilité avérée qui dépasse largement la nécessité de compenser le désengagement de l’Etat. C’est un vecteur d’attractivité territoriale, de la même manière que les entreprises y voient un avantage concurrentiel.
Mais quelle est la juste place de la sécurité privée dans cette chaîne de sécurité ?
C’est une question essentielle : qui fait quoi ? Chaque maillon doit être clairement défini pour éviter les redondances. En matière de sécurité, il faut éviter à tout prix les trous dans la raquette car c’est comme cela que s’introduisent les nuisibles. A défaut, c’est la porte ouverte à la guerre des polices, à la surabondance des moyens et à la confusion des rôles…
C’est pourquoi dans le cadre du colloque du CDSE du 17 décembre, j’encourage les collectivités territoriales, les entreprises, la sécurité privée, mais aussi les industriels à une grande alliance objective pour exprimer chacun avec ses mots et sa culture propre l’intérêt d’une vraie coproduction de sécurité, avec des objectifs clairement définis et des moyens adaptés.
Sur le terrain, cependant, les relations ne sont parfois pas aussi harmonieuses. Certains policiers municipaux voient parfois d’un mauvais œil les agents de sécurité privée, qui marcheraient sur leurs plates-bandes… N’y a-t-il pas là une forme de concurrence ?
Cette concurrence existe et elle doit être levée. Il y a quelques années encore, les polices municipales inspiraient chez certains le scepticisme. Leurs formations, leur encadrement étaient vivement décriés. Aujourd’hui, personne ne peut plus contester le service qu’elles rendent. L’immense majorité d’entre elles ont un niveau d’expertise et de responsabilités qui ont presque fait oublier qu’elles ont pris la place de l’Etat sur la voie publique. Les « PM » se sont installées dans leur maillon, dans leur créneau, dirait-on en langage marketing.
Les mêmes critiques subies hier par les policiers municipaux pleuvent aujourd’hui sur la sécurité privée. Moi, je fais le pari que ce débat sera tranché en faveur des agents de la sécurité privée, pour autant qu’elle trouve sa place précise dans le continuum. C’est le gros enjeu à venir.
La France n’est pas en avance dans la préparation des JO de 2024. Les besoins de sécurité s’annoncent énormes. La sécurité privée, très sollicitée pour cet événement, sera-t-elle prête à temps ?
Les JO de 2024, ce sont les JO des spectateurs et des athlètes. Pour nous, les professionnels et les villes qui accueilleront les épreuves sportives, l’horizon se situe à 2023 car c’est à cette date que le Comité international Olympique (CIO) viendra en France inspecter les dispositifs. Et je ne voudrais pas que la France se retrouve comme le Brésil il y a quelque année, accusée d’impréparation.
Là encore, je gage que chacun aura trouvé les moyens d’être au rendez-vous. Mais des adaptations législatives et réglementaires sont nécessaires. Par exemple dans le secteur de la vidéoprotection où les standards ont évolués. Il va falloir que l’Etat nous dise ce qui est possible techniquement, socialement et ce qui est insupportable en matière de libertés publiques. De même, en termes de formation des agents de sécurité : que faut-il faire pour améliorer la formation ?
Enfin, et je tiens à le souligner, les spectateurs comme les athlètes auront également envie de jouer un rôle dans cette chaîne : j’en vois pour preuve le succès des campagnes de communication pour les comportements à tenir en cas de crise ou encore des applications et des outils d’alerte.
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