Le Centre National de la Musique (CNM) est né d’un constat largement partagé : les bouleversements techniques et économiques de la vie musicale – le streaming, les plates formes de diffusion, la concentration dans l’organisation des festivals… mettent à mal l’existence même de la filière musicale française. Tous ces changements, si rapides, rendent nécessaires des interventions régulatrices de la puissance publique.
La première idée du CNM fut le projet de «Maison commune de la musique» dont l’objectif était centré sur le soutien aux industriels de la musique confrontés à la concurrence mondialisée, pour les aider à conquérir des marchés. En somme, la musique comme arme du «soft power» national.
Accords internationaux sur la diversité culturelle
Il a bien fallu s’étonner de ce projet bancal : il revendique que la filière musicale reçoive des aides publiques exactement comme les autres filières industrielles sans se rendre compte qu’avec cet argument, la musique devient un produit ordinaire; en somme, une marchandise comme les autres !
Cette conception du CNM n’était pas raisonnable, pour mille raisons dont une suffit : la France a bataillé dur pour obtenir à l’Unesco les accords internationaux sur la «diversité culturelle» qui énoncent clairement que «la culture n’est pas une marchandise comme les autres» ! Au regard de nos engagements dans ce combat politique, vouloir se passer de toute référence à la « diversité culturelle » pour bâtir le CNM n’avait aucun sens.
L’étape du débat au Sénat
Il a quand même fallu attendre le débat au Sénat pour que la loi sur la création du CNM se réfère à ces accords de l’Unesco sur la diversité culturelle et, donc, sur les droits culturels, comme l’on fait précédemment l’article 103 de la loi pour une nouvelle organisation de la République territoriale (loi NOTRe du 7 août 2015) et l’article 3 de la loi la loi pour la liberté de création, l’architecture et le patrimoine (loi LCAP du 7 juillet 2016).
Le CNM peut, maintenant, se déployer en respectant les principes établis à l’Unesco, dont le principe du respect des droits de l’homme, celui de la solidarité ou celui du bon équilibre entre l’économie et la culture. («La culture étant un des ressorts fondamentaux du développement, les aspects culturels du développement sont aussi importants que ses aspects économiques, et les individus et les peuples ont le droit fondamental d’y participer et d’en jouir.» art 2 de la Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles de l’Unesco de 2005).
C’est, d’ailleurs, mieux pour les industriels de la musique : puisque leurs marges financières sont généralement faibles, ils ont besoin d’une politique publique solidement fondée comme est celle de la «diversité culturelle».
Réseaux musicaux territoriaux
Il reste que la loi ne fait pas tout : le CNM aura besoin des collectivités pour que la «diversité culturelle» s’incarne concrètement, notamment en co-construction avec les réseaux musicaux territoriaux.
C’est la meilleure manière de soutenir nos industries musicales que de booster, partout, sur nos territoires les libertés effectives des artistes d’inventer de nouvelles formes musicales, en favorisant les interactions entre les cultures, en accompagnant les personnes dans des parcours artistiques élaborés avec elles.
A condition évidemment que les territoires mettent, eux- mêmes «au travail» les droits culturels des personnes et pas seulement l’ attractivité économique des manifestations musicales.
Références
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