Une question revient souvent chez les jeunes diplômés dans cette période intense de réformes : vaut-il mieux passer le concours d’attaché ou postuler sur des postes en contractuel ?
Aujourd’hui, la principale porte d’entrée pour accéder aux métiers du service public reste le concours, qui garantit l’égalité de traitement entre les candidats. Le statut gère ensuite la carrière du lauréat, en lui offrant un certain nombre de garanties et de protections, ainsi qu’à ses employeurs et aux citoyens. De plus, ce système apporte un haut niveau de compétences à un tarif très attractif, le niveau de recrutement étant nettement supérieur aux diplômes nécessaires à l’inscription aux concours (bac +3 pour un attaché).
Cependant, tout porte à croire que l’objectif des législateurs est de parvenir à diminuer l’impact de ce statut. Le monde du travail a subi une véritable mutation ces quarante dernières années, avec une précarisation accrue des carrières du privé, qui, bien entendu, vient percuter le statut de la fonction publique bien plus protecteur. Les nouvelles générations de diplômés ont d’ailleurs intégré cette précarité dans leur parcours de vie. Ils choisissent le contrat pour être plus libres et travailler pour le plus offrant. Qui pourrait le leur reprocher ? On peut seulement s’interroger sur leur rapport à l’intérêt général. Se sentiront-ils toujours aussi liés à la collectivité qui les a embauchés sur des missions limitées dans le temps ? Il n’est pas question ici de remettre en cause les évolutions du monde du travail, mais de s’interroger sur les outils à développer pour motiver ces nouveaux arrivants à rester dans la collectivité, et maintenir ainsi un socle pérenne d’agents.
Fonction publique déconsidérée
Alors, que peut offrir la fonction publique ? Indiscutablement, du sens : que l’on retrouve dans la nature même des missions rendues, dans un souci d’intérêt général, avec l’objectif d’une égalité de résultat et d’une équité de traitement.
Ce sens est accentué par l’absence de lien financier direct entre l’agent public et l’usager : il n’y a pas d’objectif financier à atteindre. L’usager n’est pas un client. Le service est désintéressé. Et pour le reste, qu’en est-il ? La sécurité de l’emploi et l’égalité de traitement sont menacées par le recours élargi au contrat, les possibilités de transfert d’office, la rupture conventionnelle, etc. Le déroulement de carrière d’un attaché est bloqué au bout de vingt à trente ans, pour le grade comme pour les fonctions. La qualité de vie est en baisse, avec une tendance à l’ouverture des services publics le soir, les week-ends, un temps de travail remis en cause et des heures supplémentaires (ni récupérées ni rémunérées pour les cadres A) en augmentation.
La question posée en préambule n’appelle pas une réponse définitive, néanmoins il devient compliqué, dans le contexte actuel, de conseiller à un jeune diplômé de se lancer dans la préparation d’un concours extrêmement difficile et concurrentiel, dont la finalité, s’il trouve un poste, reviendra à s’engager dans un modèle de fonction publique déconsidéré par les citoyens et la puissance publique, offrant un déroulement de carrière sans commune mesure avec celle du privé et où les notions de service et d’intérêt général s’étiolent progressivement après chaque réforme.
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