Renforcer l’encadrement et les sanctions à l’encontre des organisateurs de rave-parties. Ce sont les objectifs de la proposition de loi portée par Pascale Bories (LR – Gard) et votée mardi 22 octobre au Sénat. Pourtant, l’article 53 de la loi du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne, et le décret du 3 mai 2002 précisent déjà les caractéristiques de ces rassemblements et leurs conditions d’organisation. Mais pour l’opposition, le système actuel n’est pas suffisamment efficace pour « faire entrer ces fêtes dans la légalité » et « protéger les participants, l’environnement, la tranquillité des riverains et l’ordre public ». Alors que contient le texte des sénateurs ?
Déclaration obligatoire auprès du maire
Le régime d’encadrement actuel des rave-parties par les services de la préfecture ne se déclenche qu’au-delà du seuil fixé par décret, soit 500 participants prévus. En dessous, c’est le maire qui doit faire face aux événements sans même qu’il soit informé de tels rassemblements. Un « angle mort » selon les morts du rapporteur de la commission des Lois Henri Leroy (LR – Alpes-Maritimes), auquel l’article 1er doit remédier. Le texte prévoit en effet une obligation de déclaration auprès des maires des communes concernées, au moins un mois avant la date prévue. Les organisateurs devront y faire figurer les mesures envisagées pour garantir la sécurité, la salubrité, l’hygiène et la tranquillité publiques, et pour éviter les nuisances subies par le voisinage et limiter l’impact sur la biodiversité.
Transformation de l’infraction en délit
L’article 2 prévoit un renforcement des sanctions en cas d’organisation d’un rassemblement non déclaré ou interdit. L’infraction passerait d’une contravention de 5ème classe à un délit passible d’une amende de 3750 euros et d’une peine de travail d’intérêt général. La possibilité de confiscation du matériel est également ouverte.
Pour le rapporteur, il ne s’agit pas d’interdire ces événements, mais de responsabiliser les organisateurs en les « incitant à respecter le cadre légal ». Au contraire, Jérôme Durain (Socialiste et républicain – Bourgogne Franche-Comté), estime que ce durcissement pourrait « faire basculer ces fêtes dans la clandestinité ».
Une charte d’organisation
Enfin, l’article 1er bis prévoit une charte de l’organisation des rave-parties définie par arrêté conjoint du ministère de l’Intérieur, du ministre chargé de la Jeunesse, du ministre de la Culture, après concertation avec les représentants des organisations et des associations de représentants des communes. L’objectif est « d’appuyer le maire dans son dialogue avec les organisateurs ».
Il ne s’agit pas d’une nouveauté puisque cette charte d’organisation fait écho à l’arrêté du 3 mai 2002 qui fixe les conditions de souscription à un engagement de bonnes pratiques. De plus, un travail interministériel a été engagé au début de l’année 2014, aboutissant à l’élaboration d’un guide de la médiation pour les rassemblements festifs organisés par les jeunes.
Cette proposition de loi a-t-elle des chances d’aboutir ? Rien n’est moins sûr. Il faudra que le texte soit inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale puis adopté par les députés. Lors des débats, Laurent Nuñez, secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’Intérieur, n’a pas laissé planer le doute : « Si le gouvernement partage sans ambiguïté les objectifs portés par cette proposition de loi, le texte nous oblige aux plus grandes réserves. Sans atteindre les effets désirés, il est à craindre qu’il engendre des effets pervers non-désirables sur les communes et s’avère finalement contre-productif. C’est la raison pour laquelle il est difficile pour le gouvernement de le soutenir en l’état », assurant que « l’exécutif sera attentif à ce que les préfets et les forces de l’ordre assurent au moins l’information systématique des maires ».
Les associations dénoncent une « atteinte grave à la liberté de réunion »
Au total, 3200 soirées seraient dans le viseur de la proposition de loi visant à renforcer l’encadrement des rave parties. 3200 soirée qui rassembleraient moins de 500 personnes.
Parmi les organisateurs, c’est l’incompréhension qui domine. Dans un communiqué, l’association Freeform monte au créneau. « Nous dénonçons ce texte qui porte une atteinte grave à la liberté de réunion », déclare-t-elle, pointant l’imprécision d’un texte qui « étend son champ d’action à tous les « rassemblements festifs à caractère exclusivement musical » qui doivent dorénavant faire l’objet d’une déclaration en mairie quel que soit le nombre de participants ». « En gros que ce soit pour une boom, un anniversaire ou un concert privé dans votre jardin, vous devrez en faire la déclaration à la mairie au moins un mois avant. La loi ne fixant pas de seuil minimal, même le fait de se réunir à 4 sur un terrain privé pour écouter le dernier album de David Guetta pourra vous couter cher si le maire le décide, et ce même sans aucune nuisance sonore » souligne l’association qui veut alerter l’opinion publique.
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