Peut-on interdire à un parent accompagnateur de sortie scolaire de porter un signe religieux ? Peut-on soumettre ces collaborateurs occasionnels du service public à une neutralité stricte ? Mis à jour le 24 septembre dernier, le vademecum du ministère de l’Education nationale tente de répondre à ces questions en reprenant textes et jurisprudence en la matière.
Interdiction de prosélytisme
Une règle est sûre sur les mères voilées qui accompagnent les sorties scolaires : leur soumission au règlement intérieur de l’école qui doit, selon le ministère de l’Education nationale « rappeler l’interdiction de tout prosélytisme, de quelque forme que ce soit, dans l’enceinte de l’école ou de l’établissement et, hors école ou établissement, dans toutes les situations d’enseignement ou d’activités périscolaires ».
Ce qui implique qu’un parent qui désire accompagner une classe ne peut pas, par exemples :
- contester des contenus délivrés par l’enseignant ;
- avoir un comportement irrespectueux au motif du sexe, de l’origine ou de l’opinion des personnels ou d’autres parents tel que refuser de parler à un enseignant ou de lui serrer la main en raison de son sexe ;
- valoriser des tenues, des signes religieux devant les élèves dans une finalité de tentative de prosélytisme ou de propagande.
Le ministère explique ces interdictions par la nature-même de l’activité de parent accompagnateur de sortie scolaire « participant à une activité scolaire, le parent devient un accompagnateur chargé pour une part de la sécurité de tous les élèves et pas seulement de son enfant. Il contribue ainsi à la bonne marche de l’activité pédagogique. Il a donc un devoir d’exemplarité devant tous les élèves concernés par cette activité, dans son comportement, ses attitudes et ses propos ».
Toujours pas d’interdictions
Pour autant, la question de savoir si le port d’un signe religieux est acceptable par ces collaborateurs occasionnels du service public n’est, juridiquement, résolue qu’en partie.
Dans son étude de décembre 2013, le Conseil d’Etat a considéré que les parents d’élèves avaient la qualité d’usagers du service public et qu’en tant que tels ils n’étaient pas soumis à l’exigence de neutralité religieuse. Il a néanmoins précisé que « les exigences liées au bon fonctionnement du service public de l’éducation peuvent conduire l’autorité compétente, s’agissant des parents d’élèves qui participent à des déplacements ou des activités scolaires, à recommander de s’abstenir de manifester leur appartenance ou leurs croyances religieuses ».
En 2013, l’heure était donc aux recommandations pas aux interdictions. Depuis lors, deux jugements de tribunaux administratifs (Nice, le 9 juin 2015 et Amiens, le 15 décembre 2015) sont intervenus pour prohiber une interdiction de principe et rappeler que seules les exigences découlant de textes particuliers ou de considérations liées à l’ordre public ou au bon fonctionnement du service peuvent permettre de restreindre la liberté d’expression des convictions religieuses des accompagnateurs.
Faute de décision pour l’heure en appel et en cassation, en 2019, les interdictions demeurent donc illégales.
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