Une sale odeur de rumeur commence à sourdre lentement des médias généralistes : la fin de la taxe d’habitation (TH) va faire grimper en flèche la taxe foncière (TF). En cause, ces élus locaux tentés de financer leurs investissements en se garantissant un même niveau de ressources, après la disparition de la TH dont le dégrèvement s’arrêtera avec l’entrée en vigueur de la réforme fiscale. Dans certains territoires, ils seraient déjà passés à l’acte.
Cet été, l’Union nationale des propriétaires immobiliers d’Isère a habilement communiqué auprès des médias nationaux pour dénoncer la hausse de la TF constatée par 300 de ses membres » allant jusqu’à +136 % » est-il assuré dans le Parisien ! Or, ces hausses, comprises selon Le Monde entre « 8 et 30 % » n’ont aucun lien avec la disparition de la taxe d’habitation et l’avidité des élus, ce que précisent tout de même ces titres cités. Elles sont le résultat de la revalorisation des bases locatives.
Revalorisation annuelle
Cette opération parcellaire a lieu régulièrement, déclenchée par les directions départementales des finances publiques quand ce ne sont pas les collectivités elles-mêmes qui initient auprès des services fiscaux une révision de leurs bases, après avoir constaté via leurs observatoires fiscaux que tel propriétaire n’a pas déclaré son cabanon, sa véranda, quand ce n’est pas un étage entier. Simple oubli.
Selon la DGFiP, la revalorisation de ces deux dernières années concernant 134 000 logements, n’atteint même pas le total de la seule année 2016 où 149 000 logements avaient été révisés. Et, à date, 69 000 nouveaux bâtiments sont concernés en 2019. Fin de l’histoire ? En fait, non.
Avec la réforme fiscale, le gouvernement a également accepté le principe de la révision globale des bases locatives pour les logements de particuliers. Le ministre de l’Action et des comptes publics Gérald Darmanin, très sceptique sur l’opportunité d’une telle réforme début 2018, s’est finalement fait une raison : il a ainsi indiqué au printemps dernier que le prochain PLF devrait « autoriser Bercy à travailler sur ce point en 2021, en collectant les données locatives des habitants, et qu’à partir de 2022 la réforme pourrait être mise en place sur une durée de 5 à 10 ans ».
Une intention qui a aussitôt déclenché les applaudissements de toutes les associations d’élus, jugeant que cette révision en attente depuis 50 ans était la mère de toutes les réformes.
4,6 millions de locaux
C’est aussi un monstrueux casse-gueule politique. En effet, si 134 000 revalorisations de bases locatives rallument les feux du médiatique ras-le-bol fiscal, que produira la réforme portant sur 4,6 millions de locaux ? Les associations d’élus, la DGFiP et jusqu’à l’ancien secrétaire d’Etat au Budget Christian Eckert, jugent la réforme « faisable et opportune ». Ce dernier cite ainsi en exemple la réforme des valeurs locatives des locaux professionnels : « Elle s’est mise en place et plus personne n’en entend parler » s’est-il voulu rassurant récemment dans une interview accordée à la Gazette, à lire prochainement.
Il aura tout de même fallu près de 17 ans de travail pour élaborer une réforme portant sur « seulement » 3,3 millions de locaux professionnels. Pour Christian Eckert, le chantier des locaux d’habitation était quasiment bouclé à son départ : « Quand je suis parti, il ne restait plus qu’à appuyer sur le bouton et assurer un ou deux ans de travail supplémentaire ».
Son successeur était nettement moins enthousiaste l’an dernier : en se référant sur l’expérimentation menée pendant deux ans dans cinq départements – dont celui du Nord où il était élu – il juge « la réforme plus facile à dire qu’à faire » et se voit repartir « pour une dizaine d’années ».
Pour un résultat hautement inflammable si on ajoute dans l’équation la réforme fiscale, les élections municipales et le déficit du consentement à l’impôt : comment réagiront les contribuables exposés à des hausses moyenne de 25 à 41 % allant parfois jusqu’à 151 % comme l’indiquait le rapport d’expérimentation ? Début de réponse prochainement dans les urnes…
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