Le 6 juin, les sénateurs Jean-Marie Bockel (UDI, Haut-Rhin) et Mathieu Darnaud (LR, Ardèche) ont présenté devant la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation du Sénat un nouveau rapport d’information (« Réduire le poids des normes en aval de leur production ») visant une simplification des normes qui s’adresse aux collectivités territoriales. Face aux difficultés de diminuer significativement le flux des nouvelles normes ou le stock des anciennes, le gouvernement a choisi une troisième voie, celle de la réduction du poids des normes en aval de leur production. Dès 2013, il avait été demandé aux préfets de mettre en œuvre une interprétation facilitatrice des normes (circulaire n° 5646/SG du 2 avril 2013). Nouvelle étape en 2017 : par un décret du 29 décembre, une expérimentation de deux ans a donné aux préfets un droit de dérogation à certaines dispositions réglementaires afin de tenir compte des circonstances locales.
Extension aux collectivités
Pour les auteurs du rapport, ces dispositifs sont un pis-aller. « La véritable solution reste la lutte contre l’inflation normative. Pour autant, dans le contexte actuel, il ne faut pas bouder des méthodes novatrices qui s’exercent en aval de la production des normes. » Les deux sénateurs pensent même qu’il faut étendre ce mécanisme aux collectivités territoriales, c’est-à-dire « prévoir des possibilités de dérogation des autorités décentralisées sur les normes qui relèvent de leurs propres compétences ». De plus, pour le moment, la dérogation est limitée aux seules décisions individuelles résultant de l’application de normes réglementaires. Les sénateurs estiment que ce droit de dérogation doit être étendu aux normes réglementaires elles-mêmes, voire à des normes législatives.
Un « droit d’adaptation » qui, pour les sénateurs, « ne doit pas détricoter la France, ne pas fragiliser la cohésion nationale et ne pas altérer l’égalité entre les citoyens ». Ils proposent donc la mise en place d’un cadre, qui s’appuierait sur le Sénat, lui-même érigé en garant. « La chambre représentative des territoires serait obligatoirement consultée et amenée à donner un avis conforme pour l’octroi de capacités de différenciation à certaines collectivités. »
Révision constitutionnelle
Ce rapport sénatorial valide en creux, sans que cela ne soit véritablement caché, le dispositif de droit à la différenciation territoriale envisagé dans le projet de révision constitutionnelle, qui sera présenté fin juin ou début juillet en conseil des ministres.
Un projet de loi qui préciserait que « les collectivités territoriales ou leurs groupements peuvent, lorsque, selon le cas, la loi ou le règlement l’a prévu, déroger, pour un objet limité, aux dispositions législatives ou réglementaires qui régissent l’exercice de leurs compétences, éventuellement après une expérimentation autorisée dans les mêmes conditions ».
La différenciation territoriale fait donc consensus au Parlement, puisque la délégation aux collectivités de l’Assemblée nationale a récemment adopté deux rapports d’information en deux mois sur ce thème.