Ainsi donc, Emmanuel Macron compte, parmi d’autres mesures, et pour répondre à la crise des « gilets jaunes » après quatre mois de grand débat national, supprimer l’ENA.
Les mots ayant un sens, la « suppression » de grandes écoles de formation de la haute fonction publique française a suscité quelques émois, y compris dans la territoriale, car de l’ENA à l’Institut national des études territoriales (Inet), il n’y a qu’un pas. Même si, dans son intervention du 25 avril, le Président n’a pas évoqué d’« autres établissements », comme son intervention avortée du 15 avril dernier le prévoyait.
La courte échelle
Le président de la République, lui-même énarque, fait preuve d’une certaine constance. Depuis la campagne présidentielle, il reprend à son compte les critiques anciennes formulées contre l’ENA, devenue un puissant vecteur de reproduction des élites, favorisant l’entretien d’une « noblesse d’Etat », quand elle était au contraire destinée à promouvoir le mérite individuel.
Plus récemment, le journaliste Vincent Jauvert avait montré, dans son ouvrage « Les Intouchables d’Etat. Bienvenue en Macronie » (1), comment les nouvelles générations d’énarques, dont celle du Président, se font la courte échelle et enchaînent les allers-retours entre le secteur public et le secteur privé, trustant les hauts postes de direction.
Diversité des formations
L’Inet serait-il porteur des mêmes tares, pour mériter le même sort ? Pour un ancien élève qui estime que l’école « entretient le corporatisme », on entend surtout des administrateurs et administratrices qui défendent les différences fondamentales entre les deux parcours.
Et d’abord la diversité des formations. Former des administrateurs entrés par la voie du concours externe ou de l’examen professionnel, mais aussi des ingénieurs en chef ou des conservateurs des bibliothèques, induit une diversité d’origine et des confrontations qui protègent du confort et des risques de l’entre-soi.
« Même avec leurs défauts, le Centre national de la fonction publique territoriale et l’Inet restent des régulateurs indispensables », défend cet ancien administrateur pourtant pas avare de critiques.
Si Emmanuel Macron va au bout de son projet de « rebâtir l’organisation profonde » de la formation de la haute fonction publique, il pourrait bien tirer profit du modèle territorial.