La commune de Cannes a confié à la société Uniparc Cannes, par un contrat de DSP conclu le 31 mars 1995, la construction et l’exploitation d’un parc de stationnement ainsi que l’exploitation de sept parcs de stationnement existants pour trente ans. Mais après vingt-trois ans de DSP, le conseil municipal de Cannes a décidé de résilier cette convention à compter du 1er mars 2019. Le but de l’exécutif municipal cannois : reprendre en régie les huit parkings du centre-ville afin de réduire les tarifs et proposer de nouvelles offres attractives, dans le but de redynamiser le cœur de ville.
Considérant cette décision de résiliation illégale, la société Uniparc Cannes a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Nice d’une demande tendant à la suspension de l’exécution de la décision de résiliation du contrat dont elle était titulaire et à ce que soit ordonnée la poursuite des relations contractuelles. Ses demandes ayant été rejetées par le tribunal, la société a saisi le Conseil d’Etat.
Revirement
Sans y faire une référence expresse dans sa décision du 25 janvier, le Conseil d’Etat applique sa jurisprudence « Béziers 2 ». Pour rappel, l’arrêt dit « Béziers 2 » opère un revirement de jurisprudence en permettant aux parties de contester la décision de résiliation d’un contrat administratif et de demander la reprise des relations contractuelles. Sauf que cette possibilité offerte aux cocontractants de l’administration est encadrée par le juge.
Ce dernier étant notamment amené à opérer une mise en balance des intérêts en cause et apprécier si, « eu égard à la gravité des vices constatés et, le cas échéant, à celle des manquements du requérant à ses obligations contractuelles, ainsi qu’aux motifs de la résiliation, […] une telle reprise n’est pas de nature à porter une atteinte excessive à l’intérêt général » (« Béziers 2 »).
Gravité des vices
En 2019, le Conseil d’Etat est allé plus loin en précisant d’office que le juge du référé-suspension saisi dans le cadre d’un recours « Béziers 2 » ne peut se contenter, pour rejeter les demandes du cocontractant, de juger que la reprise provisoire des relations contractuelles serait, en tout état de cause, de nature à porter une atteinte excessive à l’intérêt général justifiant la décision de résiliation des dites relations contractuelles.
En effet, ce que reproche la haute juridiction au juge des référés, c’est de ne pas avoir recherché si les vices invoqués par la société à l’encontre de la mesure de résiliation étaient d’une gravité suffisante pour conduire à la reprise des relations contractuelles. Le juge s’étant borné à relever que la société soutenait que la décision litigieuse était entachée de plusieurs vices.
On retiendra donc de la décision « cannoise » que l’existence d’un motif d’intérêt général s’opposant à la reprise des relations contractuelles ne peut pas être appréciée indépendamment de la gravité des vices affectant la mesure de résiliation. Ou comment l’intérêt général doit, lui aussi, se confronter aux exigences de la légalité.
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