La Seine-Saint-Denis ne se laissera pas contraindre sans réagir ! Contestant, sur le fond comme sur la forme, l’augmentation des dépenses limitée à 1,2 %, le conseil départemental déposera ce vendredi 12 octobre un recours contre l’arrêté préfectoral. Non seulement, Stéphane Troussel, son président (PS), continue de dénoncer le dispositif « absurde et scandaleux » de la contractualisation qu’il assimile à « un retour à la mise sous tutelle des collectivités, alors que l’État n’a toujours réglé le financement des allocations de solidarité », mais, en outre, il s’élève contre « l’absence de prise en compte des caractéristiques de la collectivité ».
« J’avais à peine refusé de signer que le préfet me notifiait un taux de limitation des dépenses de 1,2 % entre 2018 et 2019. Nous avions deux mois pour contester la notification, et nous le faisons donc avec un référé-suspension et un recours pour excès de pouvoir », poursuit le président de la Seine-Saint-Denis qui espère voir annulé le taux imposé.
Aucune bonification appliquée !
Trois arguments ont motivé sa décision. En premier lieu, « l’absence de modulation ». La loi de programmation des finances publiques prévoyait une modulation à la hausse ou à la baisse, en prenant en compte la démographie, le revenu moyen par habitant et les efforts consentis – ou non – par la collectivité en matière de dépenses.
« Mais on a l’un des revenus par habitant les plus bas d’Ile-de-France et même au-delà », s’insurge Stéphane Troussel, qui souligne que son département, qui fait face à une augmentation globale de la population, « construit des collèges à tour de bras. Aucun des critères n’a été pris en compte et nous n’avons bénéficié d’aucune bonification. »
Une incompréhension renforcée par le fait que « dès le départ », les services préfectoraux l’ont informé que le département ne bénéficierait pas de la modulation qui profiterait pourtant à des communes de Seine-Saint-Denis.
Prise en compte des dépenses, pas des recettes
« L’insuffisance du contradictoire » est son second grief. « Il n’y a pas eu d’échanges, c’est une décision unilatérale », tempête-t-il en regrettant de ne pas avoir pu faire valoir ses arguments. D’où son constat d’une « vision très jacobine au sommet de l’État ».
« L’absence de prise en compte de la charge nette » est son troisième argument. « Les contrats ne prennent en compte que les dépenses, pas les recettes ! Sur un beau projet qui nécessitera plusieurs financements, plus aucune ne voudra porter la responsabilité de la dépense, cela va limiter les co-financements », avertit Stéphane Troussel. « Quel intérêt y aura-t-il à aller chercher des financements européens, puisque, au final la collectivité se verra imputer la dépense ? »
Il estime sa démarche bordée de bon sens, face à la non prise en compte de la situation du terrain. « Comment peut-on appliquer 1,2 % sans prendre en compte les caractéristiques du territoire, et sans régler la question du financement de la solidarité nationale, essentielle en Seine-Saint-Denis ? », martèle-t-il.
Le département francilien est le seul, à ce jour le seul, à avoir annoncé le dépôt d’un recours. D’autres pourraient suivre, car si certaines collectivités ont d’ores et déjà annoncé qu’elles n’engageraient pas de démarche, plusieurs autres communes ou départements – pas uniquement ancrés à gauche – ont déjà contacté la Seine-Saint-Denis afin de connaître ses arguments.
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Contractualisation : un nouveau mode de gestion financière à l’épreuve
Sommaire du dossier
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