Démontrant déjà qu’ils pouvaient dépasser leurs étiquettes politiques (LR, PS, PCF) pour faire front commun en manifestant pour la survie de leurs territoires, les départements franciliens mettent désormais leur principe de solidarité en pratique.
Ainsi qu’ils en avaient fait l’annonce de principe, en avril dernier, ils mettent en œuvre un fonds de solidarité interdépartemental d’investissement (FSII) auquel chaque conseil départemental contribuera en fonction de ses possibilités financières (investissement et épargne nette – voir ci-dessous). Ce calcul permettra aux Hauts-de-Seine et Yvelines de mettre plus dans l’escarcelle que la Seine-Saint-Denis et le Val d’Oise.
Solidarité à huit
Mais les conseils départementaux de l’Ouest, plus riches et surtout moins endettés, pourraient ne pas être les seuls gros contributeurs, puisque Paris aurait « très envie de nous rejoindre », a confié Stéphane Troussel (PS), président de Seine-Saint-Denis. Emmanuel Grégoire, premier adjoint à la maire de la capitale, qui ne pouvait assister à la réunion, l’aurait assuré que « Anne Hidalgo a demandé à ses services la possibilité d’intégrer ce fonds ». Ce n’est donc plus à sept, mais à huit que la solidarité francilienne s’opérerait.
Les participations des uns et des autres seront inégales, « mais tous les départements ont tenu à contribuer », assure l’un des proches du dossier qui voit d’un bon œil qu’il n’y ait pas, d’un côté ceux qui donnent, et de l’autre ceux qui ne font que recevoir.
En janvier 2019, le fonds s’élèvera à 150 millions d’euros (sans l’apport, puisque encore non officialisé, de Paris) et pourra évoluer, en fonction des critères de calcul, les années suivantes.
De 9 à 62 M€ de contribution
Pour doter le fonds de solidarité de plus de 150,6 millions d’euros, les sept départements contribueront à hauteur de 5 % de la moyenne de leurs investissements 2015-2017 et à hauteur de 7 % de leur épargne nette 2016.
Les Hauts-de-Seine apporteront la plus grosse part (62,26 M€) puis les Yvelines (27,04), la Seine-et-Marne (13,14), le Val-de-Marne (15,94), la Seine-Saint-Denis (13,47), l’Essonne (9,55) et le Val d’Oise (9,24), ces deux derniers étant très endettés.
Des décisions à l’unanimité
Pour gérer ce fonds, les présidents de Seine-et-Marne, Yvelines, Essonne, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne et Val d’Oise créent un établissement public interdépartemental dont ils seront les seuls membres du conseil d’administration et dont le siège sera à Cergy-Pontoise. Ils prendront obligatoirement leurs décisions à l’unanimité. « Une gouvernance très resserrée et une unanimité ont été voulues pour que ça marche bien », confie-t-on dans l’entourage des élus.
Ensemble, ils détermineront les projets à financer dont les thématiques, communes aux sept territoires, s’articuleront principalement autour de la rénovation urbaine avec « une volonté de rééquilibrage » ; les routes avec des infrastructures structurantes ; une politique d’équipements optimisés, comme la construction d’établissements d’accueil pour autistes, par exemple, à l’image de celui qui est aujourd’hui porté par l’EPI Yvelines-Hauts de Seine, aux Mureaux.
Ce volet permettra de revaloriser l’investissement public sans qu’il soit nécessaire de créer un établissement médico-social par département. Les sept territoires veulent ainsi démontrer que « si on est capable de se mettre d’accord à plusieurs, nous pouvons être le quatrième acteur ».
Volontaires pour payer deux fois plus
Ce fonds d’entraide entre les sept départements ne se substituera pas au Fonds de solidarité pour les départements de la région d’Ile-de-France (FSDRIF). Créé par l’article L. 3335-4 du code général des collectivités territoriales, il impose un mécanisme de péréquation horizontale aux départements franciliens, afin de corriger l’inégale répartition de richesse fiscale et de charges de ces départements.
Oubliée l’époque où Yvelines et Hauts-de-Seine dénonçaient les sommes versées à la Seine-Saint-Denis : les territoires de l’Ouest proposent d’être encore plus royalistes que le roi. Répondant à une requête du président de la Seine-Saint-Denis, Stéphane Troussel (PS), en faveur d’un soutien financier renforcé, les présidents altoséquanais Patrick Devedjian (LR) et yvelinois Pierre Bédier (LR) demandent eux-mêmes à doubler leur contribution au FSDRIF, actuellement de 60 M€. À noter que Paris et les Hauts-de-Seine en sont les plus gros contributeurs (45 % chacun environ), suivis des Yvelines, avec 10 % environ.
Par une lettre adressée ce matin même à Emmanuel Macron, les sept présidents réclament un amendement législatif modifiant le calcul et autorisant les deux territoires de l’ouest francilien à mettre 120 M€ sur la table. Et plus encore si Paris devait être également concerné.
Pauvres et riches à la fois
- Pour le FSDRIF, Paris, Yvelines et Hauts-de-Seine sont les plus gros contributeurs, au bénéfice des autres départements franciliens.
- Toutefois, tous contribuent au fonds de péréquation du bloc communal (Fpic) et 320 M€ sont versés par les sept départements franciliens, hors Paris. Comme quoi, on peut être jugé pauvre en Ile-de-France, mais suffisamment riche pour venir en aide à la province.
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