Les contrats sont bouclés mais les négociations se poursuivent. Jeudi 12 juillet, les membres du comité de suivi de la contractualisation financière Etat-collectivités se sont réunis pour la troisième fois, autour de Jacqueline Gourault et Olivier Dussopt, respectivement ministre auprès du ministre de l’Intérieur et secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics.
Il a été décidé de la création, « d’ici à la fin de l’année », de deux groupes de travail « chargés d’élaborer les modalités précises de l’évaluation qui interviendra au premier semestre 2019 et, le cas échéant, celles relatives aux reprises financières », font-ils savoir dans un communiqué commun.
Une ouverture plutôt bien vue de la part des associations (1), qui réclament que des améliorations soient apportées au dispositif qu’elles ont largement approuvé.
Si le gouvernement s’est félicité du bilan chiffré de cette nouvelle méthode, les représentants des collectivités, à l’instar de Villes de France, ont profité, eux, de la réunion pour rappeler leurs doléances.
.@FLeturque représente en ce moment @villes2fr au 3eme comité de suivi sur la contractualisation financière État – collectivités. Nous demandons une meilleure individualisation de la contrainte pour les collectivités et la prise en compte des charges imposées par l'État pic.twitter.com/XYjWEVn1cS
— Villes de France (@villes2fr) July 12, 2018
Car les bons taux de signatures – 71 % au total – ne sauraient « constituer un critère d’évaluation du dispositif ni un indicateur de satisfaction », a écrit ainsi Jean-Luc Rigaut, président de l’ADCF, au Premier ministre, quelques jours avant cette réunion (voir ci-dessous). « Maintenant que la date de signature des contrats est passée, il faut s’atteler à corriger les effets pervers », explique Franck Claeys, directeur Economie et finances territoriales de France urbaine.
« Réticence du gouvernement à changer la loi »
Parmi les « amendements prioritaires » identifiés par l’association, partagés par l’ADCF, la question de la prise en compte des participations versées à un syndicat pour des projets d’investissement, qui sont actuellement comptées en dépenses de fonctionnement.
« Il y a une ouverture de la part du gouvernement, qui se traduit par la création d’un groupe de travail » sur ce sujet, veut croire Franck Claeys.
« L’idée est de voir quelles sont les possibilités de retraitement à partir de la nomenclature actuelle », complète Claire Delpech, responsable Finances, fiscalité et habitat de l’ADCF, soulignant la « réticence du gouvernement à changer la loi de programmation ».
L’objectif du groupe de travail, composé de représentants de la DGFIP et des associations d’élus, est donc d’étudier si des ajustements réglementaires (et non législatifs) peuvent suffire.
Le deuxième groupe de travail devrait plancher pour sa part sur le traitement des transferts de compétences entre communes et intercommunalités et des mutualisations mises en œuvre. Dans son courrier, l’ADCF réclamait la « prise en compte du coût progressif de l’exercice des compétences dans les cas de changement de statut par exemple ». Car s’il est prévu de considérer les dépenses à champ constant, « le coût réel de l’exercice de compétences nouvelles n’est véritablement stabilisé que trois ou quatre années consécutives à une évolution de périmètre ».
La question du tiers de confiance n’est pas tranchée
En revanche, selon les associations, le gouvernement se montre inflexible sur d’autres points. « Sur la question des charges nouvelles imposées par l’Etat, comme la scolarisation obligatoire à trois ans, on est restés dans une logique de posture », regrette Franck Claeys.
« Idem sur notre demande de prise en compte des charges nettes plutôt que des dépenses brutes. » « En ne retenant que les charges brutes, le dispositif de contractualisation incite les collectivités à renoncer à engager certaines dépenses qui bénéficient pourtant de ressources propres et sont sans conséquences sur l’équilibre budgétaire de la collectivité », estime de son côté l’ADCF. C’est notamment le cas des politiques contractuelles portées au nom de l’Etat.
Pas d’avancée non plus sur le « tiers de confiance » qui jouerait le rôle d’arbitre entre Etat et collectivités, réclamé par France urbaine. « Le sujet n’est pas tranché, même si ce n’est pas un non définitif », analyse Franck Claeys. Toutefois, « les CRC ne sont pas en demande, et l’Etat n’a pas envie de complexifier les choses et de mettre les préfets en position d’être déjugés », rapporte-t-il.
L’ADCF, elle, plaide pour la mise en place, au niveau local, d’une « instance de médiation » qui permettrait, « là où il y a des points durs, de prendre un peu de recul », explique Claire Delpech. Composée de représentants des ministères et des collectivités, d’experts de la Cour des comptes et de personnalités qualifiées, elle pourrait être mobilisée « selon des règles qui restent à définir », pour « traiter de cas complexes de retraitement ».
Dans l’attente de propositions de la part du gouvernement sur l’ensemble de ces problématiques, les associations travaillent d’ores et déjà sur des amendements qu’elles souhaitent défendre dans le cadre du projet de loi de finances pour 2019. Tout en précisant qu’elles ne souhaitent pas « remettre en cause l’esprit de la loi et ses objectifs », mais plutôt anticiper les débats du printemps prochain, lorsque les préfets décideront si les objectifs ont été tenus.
Cet article fait partie du Dossier
Contractualisation : un nouveau mode de gestion financière à l’épreuve
Sommaire du dossier
- « Contractualisation : il faut abandonner l’illusion du contrôle »
- Contrats de Cahors : « Un jeu de dupes qui pénalise les bons élèves »
- Contractualisation : les retraitements font la différence !
- Les premiers contrats financiers Etat-collectivités sont signés
- Les contrats financiers, ou le retour du préfet père Fouettard
- Contrats financiers : la Seine-Saint-Denis dépose le premier recours contre l’arrêté préfectoral
- L’inflation, la prochaine inquiétude des maires
- Contrats financiers : Edouard Philippe fait un petit pas vers France Urbaine
- Contrats financiers : les collectivités qui n’ont pas signé affûtent leurs arguments
- Contrats financiers : ce que devront contenir les arrêtés préfectoraux visant les non-signataires
- Contrats financiers : après les signatures, les négociations continuent
- Contrats financiers : qui a refusé de signer avec l’Etat ?
- Contrats financiers : 228 collectivités disent oui à l’Etat
- A Lille, Edouard Philippe vante encore les contrats financiers
- Contrats financiers : les régions réclament des engagements de l’État
- Contrats financiers : ces élus communistes qui refusent de signer par principe
- « La contractualisation est une approche technocratique »
- Contractualisation : Edouard Philippe met en garde les non-signataires
- Dernière ligne droite pour la négociation des contrats financiers
- Contractualisation : la colère gronde dans le Sud-Ouest
- Contractualisation : ces collectivités qui rechignent ou s’opposent
- Olivier Dussopt clarifie la mise en œuvre de la contractualisation
- Contractualisation : pourquoi ça passe pour Nice, mais pas pour Cannes ou Antibes
- Exclusif : le détail de la circulaire sur les dépenses de fonctionnement
- Contractualisation : ce qu’en pensent les collectivités-test
- Contractualisation : le projet de contrat-type sur lequel planchent les « collectivités test »
- La Cour des comptes tacle la contractualisation financière
Thèmes abordés
Notes
Note 01 seuls les élus de France urbaine, l'ADCF et Villes de France y participaient, en l'absence de ceux de l'AMF, Régions de France et de l'ADF Retour au texte