Divisées, les associations d’élus ? C’était le sentiment de bon nombre d’observateurs ces derniers mois. L’Association des maires de France avait en partie pratiqué la politique de la chaise vide lors de la Conférence nationale des territoires, fâchée par le dispositif de contractualisation financière entre l’Etat et les collectivités. L’AMF avait, certes, envoyé en observateur la maire de Morlaix, Agnès le Brun.
Mais elle voyait déjà d’un mauvais oeil la contractualisation. Ce dispositif vise à limiter la hausse des dépenses de fonctionnement à 1,2% par an pour 322 collectivités les plus importantes de France (qui enregistrent des dépenses de fonctionnement de plus de 60 millions d’euros). L’objectif ? Contraindre celles qui représentent 75% de la dépense publique, dixit Olivier Dussopt, le secrétaire d’Etat aux collectivités locales, à maîtriser l’évolution de leurs dépenses.
Toujours en attente de précisions
Contrairement à l’AMF, France urbaine et l’Assemblée des Communautés de France s’étaient montrées plutôt allantes sur la contractualisation à Cahors. L’Assemblée des départements de France et Régions de France étaient, elles, bien présentes pour écouter le Premier ministre essayant de rassurer les collectivités. Inquiètes, certes, mais également soucieuses de rester dans une posture de dialogue pour amender la proposition du gouvernement.
L’union paierait-elle finalement plus que la division ? C’est bien possible à en croire le front uni que promettent désormais les principales associations du bloc local, qui donnent rendez-vous le 10 avril prochain pour une conférence de presse commune.
L’annonce en a été faite par le vice-président de l’AMF, André Laignel, qui intervenait lors du colloque organisé par la Gazette, ce 28 mars au Sénat, sur les 15 ans des lois de décentralisation « Raffarin ». Et pour les élus, les raisons à la colère ne manquent pas.
La libre-administration, la grande absente de la contractualisation ?
« Avec la contractualisation, les budgets vont être vérifiés par les préfets. Il faut me dire où est la libre administration là-dedans. On me parle de contrat, mais ce n’est en aucun cas un contrat librement consenti. C’est un contrat léonin », s’est exclamé l’ancien secrétaire d’Etat aux collectivités locales sous François Mitterrand.
Même son de cloche du côté de Dominique Bussereau, également présent au Sénat. Le président de l’ADF a prévenu : « les départements ne veulent pas signer ces contrats. Nous prenons déjà en charge de nombreuses prérogatives de l’Etat, comme la sécurité des citoyens via les pompiers, la solidarité nationale avec le RSA. Et en plus, nous devrions justifier devant les préfets chacune de nos dépenses et voir potentiellement nos dotations baisser si nous n’avons pas pu respecter ce contrat ? C’est non ! »
L’ADF, qui s’est toujours déclarée opposée à toute signature de ses membres, leur a d’ailleurs adressé une « anti -irculaire », pour contourner le mode d’emploi mis au point par le gouvernement.
Cette union sacrée irait-elle jusqu’à des propositions communes de la part de Régions de France, de l’AMF et de l’ADF ? Aucune des parties prenantes n’est encore allée sur le terrain.
D’accord, oui mais pas sur le foncier bâti !
Si la contractualisation entre Etat et collectivités fait l’unanimité contre elle, l’heure n’est pas à la cohésion sur le sujet du foncier bâti. Alors que le gouvernement envisage de transférer la taxe sur le foncier bâti aux communes pour compenser la fin de la taxe d’habitation, l’ADF y est fermement opposée. Et pour cause : c’est sa principale ressource financière. L’AMF, très inquiète de l’avenir des finances communales, plébiscite, elle, cette option.
Une franche divergence qui a donné lieu à une passe d’armes feutrée entre Dominique Bussereau et André Laignel lors du colloque du 28 mars. L’ancien ministre des transports a ainsi déclaré qu’il était « inacceptable de supprimer le seul impôt départemental » tandis que le président du Comité des finances locales (et représentant du bloc communal) a estimé que « c’était l’impôt le plus facile à basculer vers les communes » dans le contexte de la disparition de la taxe d’habitation, même s’il ne comblera pas totalement le manque à gagner.
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