Jacqueline Gourault
Avec le feu vert des Sages à l’exonération massive de la taxe d’habitation (TH), le pouvoir a franchi sans encombre la première haie. Mais un obstacle d’une tout autre ampleur se dresse sur sa route : la réforme de la fiscalité locale, serpent de mer de la vie publique.
De la non-révision des bases de calcul des taxes sur les logements et les commerces, à la fin de la seule part « salaire » de la taxe professionnelle (TP), aucun gouvernement n’a osé s’attaquer à l’ensemble du système. Résultat, la fiscalité locale est devenue aussi illisible qu’injuste.
Système à bout de souffle
Cerise sur le gâteau, la refonte des dotations versées par l’Etat, qui aurait pu rééquilibrer le tout, a été abandonnée en rase campagne. Quant aux critères de redistribution (la fameuse péréquation), ils sont devenus si opaques que les meilleurs spécialistes en perdent leur latin.
Dans ces conditions, la création d’un « impôt plus juste », qui ne viendrait pas forcément alourdir le niveau déjà très élevé de la fiscalité, apparaît comme une impérieuse nécessité. Mais mieux vaut le dire mezza-voce.
Pour avoir, la première, énoncé cette vérité, la ministre auprès du ministre de l’Intérieur, Jacqueline Gourault, a été, comme dans la chanson de Guy Béart, exécutée. Clouée au pilori par le ministre de l’Economie, Bruno Lemaire, selon qui « on ne supprime pas un impôt » — la taxe d’habitation — « pour en rétablir un autre ».
Diktat de Bercy
L’ancien pensionnaire de l’ENA n’a fait qu’obéir au credo jacobin de son administration. Pas question de donner aux collectivités, si gourmandes en personnel et en deniers publics, la possibilité de bénéficier d’un nouvel impôt avec un pouvoir de taux. Sous des dehors techniques, ce dossier se révèle donc ultrapolitique.
Après la disparition de la TP, la mort programmée de la TH bat un peu plus en brèche l’autonomie fiscale des collectivités. C’est toute l’architecture financière de la décentralisation à la française qui est remise en cause. Comme le souligne le directeur général des services de département Jean-Luc Bœuf, l’Etat fait le choix, non assumé, d’en finir avec la fiscalité locale.
Cet article est en relation avec le dossier
Thèmes abordés