Déjà en voie de cadrage élargi dans une optique de simplification et de meilleur contrôle généralisé, les plateformes de location de logements saisonniers sont de nouveau sous le feu des projecteurs.
Le 8 décembre, en effet, les députés ont voté deux amendements (voir en fin d’article) : le premier vise à alourdir la taxe de séjour des hébergements non (ou non encore) classés ; le second, à permettre aux plateformes de réservation de type Airbnb ou Abritel de percevoir la taxe de séjour au réel, laissant aux plateformes autres que celles d’intermédiation locative, de collecter la redevance, à condition d’avoir été mandatées par les logeurs.
Face à une série d’amendements divers présentés lors de l’examen en première lecture du projet de loi de finances 2018, le rapporteur général du budget, Joël Giraud (LREM) avait obtenu qu’un groupe de travail propose, dès le projet de loi de finances rectificative pour 2017, un amendement complet prenant en compte l’ensemble des difficultés liées à la taxe de séjour.
Un engagement tenu, puisque deux amendements ont été adoptés en séance plénière du PLFR, le 8 décembre, par le rapporteur général et par les représentants de l’ensemble des groupes de l’Assemblée, à l’exception des Insoumis.
+1 à 5 % HT
Le premier amendement est tout bonnement une hausse de certains plafonds et planchers de la taxe de séjour pour certaines catégories d’hébergement. En clair : un alinéa à l’article L.2333-30 du code général des collectivités territoriales (CGCT) permet aux communes de majorer la taxe de 1 à 5 % hors taxe par personne majeure et par nuit, dans la limite du tarif le plus élevé fixé par la collectivité, soit 4€. Alors qu’actuellement, la taxe de séjour pour la catégorie des meublés touristiques non classés s’élève à 0,83€ par personne et par nuitée.
Les communes et EPCI ayant déjà fixé les montants de leur taxe de séjour pourront les modifier d’ici octobre 2018 afin de les appliquer au 1er janvier 2019. L’amendement concerne principalement les meublés non classés (proposés à la location par les plateformes de réservation en ligne) ou ceux en cours de classement (hôtel, résidence de tourisme, villages vacances, etc.). mais ne s’est pas intéressé aux campings.
Oeuvre de cohérence
Les députés voient dans cet amendement l’opportunité d’une meilleure coordination. Les collectivités ne seront plus contraintes de fixer des tarifs parfois complexes pour des logements insolites, puisque la référence désormais appliquée sera le barème tarifaire s’ils sont classés, ou le coût de la nuitée s’ils sont sans classement.
En revanche, les plateformes de réservation n’auront plus la possibilité de déclarer sans classement un hébergement dont elles n’avaient pu établir la catégorie. Les parlementaires affirment s’être intéressés à la perspectives de meilleures rentrées financières pour les collectivités, puisque le gain supplémentaire pourrait être de “150 M€ de recettes” pour celles qui appliquent une taxe de séjour, selon l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (UMIH).
Collecte généralisée en 2019
Le second amendement est une extension de la collecte généralisée par les plateformes de réservation d’hébergements appartenant à des particuliers. Un pas de plus vers une réglementation souhaitée de ce secteur, même si, dans les rangs du PC comme des LR, des élus estiment que les mesures ne vont pas encore assez loin.
Airnb procède déjà à la collecte de la taxe de séjour depuis 2015, avec une extension à 50 grandes villes depuis mai dernier.
La plateforme se dit en mesure d’étendre le dispositif à tout le pays aux dates imposées. Avec le sentiment de simplifier la tâche des collectivités, quand les maires redoutaient, au contraire, de manquer de visibilité sur la réalité des locations dans leur territoire.
Une taxation au bénéfice de l’hôtellerie !
“La taxation proposée est profondément discriminante pour les locations meublées par rapport à l’hôtellerie.” S’exprimant au nom des principaux acteurs de la location de vacances (Airbnb, Homelidays, CléVacances, Offices de tourisme de France, …) réunis au sein de l’union nationale pour la promotion de la location de vacances (UNPLV), Timothée de Roux, directeur général d’Abritel-HomeAway, dénonce les faits suivants :
- “Un palace parisien est taxé 0,99€” alors qu’un simple appartement le serait “à 5€ par personne et par nuit”,
- La proposition “contredit l’intérêt des locataires issus des classes moyennes” qui ne peuvent aller à l’hôtel “et les objectifs de simplification affichés par les pouvoirs publics,
- Le mode de calcul de la taxe “constitue une distorsion de concurrence inacceptable, destinée à favoriser les seuls acteurs de l’hôtellerie.”
Favorable à “la collecte automatisée de la taxe de séjour par toutes les plateformes et tous les sites internet” et à “une taxation forfaitaire des locations de vacances” permettant de “simplifier la collecte et le reversement de la taxe de séjour aux collectivités concernées”, l’UNPLV souhaiterait voir l’ensemble des acteurs publics et privés atteindre l’objectif des 100 millions de voyageurs étrangers en 2020, plutôt que d’assister à une perte “d’attractivité de la France”, alors que le tourisme, tous hébergements confondus, représente “8 % du produit intérieur brut (PIB).”
Références
- Voir l'amendement portant sur le plafond de la taxe de séjour ici
- Voir l'amendement portant visant à généraliser la collecte de la taxe de séjour « au réel » par les plateformes internet ici
Cet article fait partie du Dossier
PLF 2018 : fiscalité et pacte financier, la nouvelle donne
Sommaire du dossier
- Le PLF 2018 et la loi de programmation ont été définitivement adoptés
- Exclusif : L’Etat rend 80 millions d’euros aux intercos
- Les communes rurales, pas si épargnées par le PLF qu’il n’y parait
- Le Sénat rejette le PLF 2018 en nouvelle lecture
- La fiscalité locale commerciale en question au Parlement
- Le gouvernement assouplit les contraintes financières des collectivités
- Contractualisation avec l’Etat : les normes de désendettement inquiètent les collectivités
- La taxe de séjour alourdie de 150 ME pour les plateformes de réservation
- Les maisons de l’emploi menacées d’asphyxie financière
- Vote des cotisations minimum de CFE repoussée au 15 janvier 2018 : Promesse tenue !
- Toutes les modifications du volet « dépenses » du PLF votées par le Sénat
- Le Sénat adopte le volet « recettes » du PLF sans la réforme de la taxe d’habitation
- Les EPCI à FPU éligibles à la DGF bonifiée rassurés ?
- PLF 2018 : les modifications du volet « dépenses » votées en commission à l’Assemblée
- Loi de programmation des finances publiques : attention à l’objectif de désendettement !
- PLF 2018 : les députés ont adopté le texte en première lecture
- La Métropole de Lyon se taille un statut à sa mesure sur le versement de la CVAE
- Ce que préconise la mission Richard/Bur pour plafonner les dépenses
- Le Sénat attaque l’examen du PLF en reportant la réforme de la Taxe d’habitation
- La loi de programmation 2018-2022 : un acte unilatéral
- Budget 2018 : la confiance avec les élus locaux reste à construire
- Les fonds de la réserve parlementaire ne font pas consensus
- Le Sénat desserre la contrainte financière sur les collectivités
- L’Assemblée nationale adopte le budget 2018 et la loi de programmation 2018-2022
- PLF 2018 : le relevé des articles intéressant les collectivités locales
- Loi de programmation : les députés assouplissent (un peu) les contraintes sur les collectivités
- Comment l’Etat veut contraindre les collectivités à se désendetter
- Finances publiques : ce qui attend les collectivités d’ici à 2022
- Budget 2018 : un pacte financier qui souffle le chaud et le froid
- PLF 2018 : quelles mesures et quelles menaces pour les collectivités ?
- Baisse des dépenses : Edouard Philippe officialise le scénario tendanciel
Thèmes abordés