La proposition avait disparu des écrans depuis la campagne présidentielle. L’échec de Benoît Hamon semblait avoir enterré la volonté de mettre en place un revenu universel. Huit présidents de départements, tous socialistes, viennent de relancer l’idée.
Les présidents de Gironde, Jean-Luc Gleyze ; Aude, André Viola ; Ariège, Henri Nayrou ; Gers, Philippe Martin ; Meurthe-et-Moselle, Mathieu Klein ; Haute-Garonne, Georges Méric ; Ille-et-Vilaine, Jean-Luc Chenut ; Seine-Saint-Denis, Stéphane Troussel ont expliqué, le 26 novembre dans une tribune au Journal du Dimanche, « pourquoi [ils vont] tester le revenu universel dans [leurs] départements ».
Lutter contre le non-recours
Pour expliquer leur volonté d’expérimenter ce nouveau dispositif, les présidents de conseils départementaux mettent en avant la lutte contre le non-recours aux droits. Ils écrivent ainsi :
Nous qui gérons le Revenu de solidarité active (RSA), nous mesurons tous les jours le rôle essentiel d’un filet de sécurité contre la grande pauvreté, mais aussi ses limites. Sa complexité et celle de l’ensemble des minimas sociaux engendrent du non recours – plus de 30% de ceux qui ont droit au RSA n’en font pas la demande –, des ruptures de droits, des indus. Le RSA échoue à vaincre la pauvreté, qui frappe près de 9 millions de personnes en France, et suscite la stigmatisation de ceux qui le perçoivent.
Non-connaissance des dispositifs, difficultés à constituer le dossier ou peur d’être jugé comme « assisté »… font en effet partie des raisons énuméré par l’Odenore (Observatoire des non-recours aux droits et services). Son animateur, Philippe Warin, expliquait ainsi à la Gazette :
Le non-recours renvoie à toute personne éligible à des prestations financières ou non financières, légales et extra-légales, qui pour diverses raisons ne perçoit pas tout ou partie de ces droits.
Mais, pour le sociologue, le revenu de base n’était pas forcément la solution :
La question d’un revenu universel est un autre sujet qui mérite d’être abordé en tant que tel. Son lien avec le non-recours est probablement à trouver autour du caractère plus ou moins systématique d’un tel dispositif.
Etude théorique
Au-delà du non-recours, les signataires de la tribune veulent aider les travailleurs pauvres avec un dispositif qui vient en complément des petits salaires. « Les travailleurs pauvres ont besoin, pendant les périodes où ils ont de toutes petites rémunérations, d’avoir un revenu décent », a précisé au micro de France Inter, Stéphane Troussel.
Alors que les départements se plaignent, la Seine-Saint-Denis en tête, de ne pouvoir financer le RSA, comment veulent-ils lancer l’expérimentation sur le revenu de base ? La réponse à cette question ne devrait être connue que dans quelques mois.
Pour l’heure, les départements vont – seulement – lancer une « étude théorique », « pour analyser les bas revenus, pour modéliser de manière économique, scientifique et crédible » un dispositif, a expliqué Stéphane Troussel.
La Gironde avait déjà lancé, en février 2017, une analyse. Les sept autres département vont s’y coller, permettant une vision plus globale avec des départements différents : « très urbains pour la Seine-Saint-Denis, très rural pour la Creuse », a résumé Stéphane Troussel.
Les prochaines étapes prévoient donc la publication de l’analyse des bas revenus en mars 2018, avant la restitution des modèles économique pour l’été. Une proposition de loi pour permettre une expérimentation concrète serait alors déposé au Parlement à l’automne.
Les chances qu’elle soit adoptée sont cependant très minces. Durant la campagne présidentielle, Emmanuel Macron s’était en effet montré hostile au principe, il avait ainsi déclaré :
Le revenu universel existe déjà. Cela s’appelle le RSA.
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