« Le médiateur, c’est d’abord l’impartialité et la confidentialité, capable d’une « écoute active », explique Sébastien Ellie, magistrat administratif près le tribunal administratif de Poitiers.
« Certes, répond l’avocat Yvon Goutal, mais il faut aussi savoir se méfier de l’engouement que crée cette voie de résolution : il n’existe pas de certificat ou de diplôme de médiateur ».
En réalité, l’avocat et le magistrat ne s’opposent pas : le juge exigera toujours de travailler avec des médiateurs formés, qui sauront travailler avec une distance efficace. Car la recherche d’une solution « efficace », c’est l’esprit même de la médiation.
Efficacité d’abord
Un procès a pour principe le contradictoire et la publicité. En médiation, on cherche une contrepartie alternative, juridiquement compatible. « La médiation, c’est la recherche d’une solution sans perdant. « Une solution qui s’insère dans le droit », explique Yvon Goutal , à l’initiative des parties ou du juge.
Présentée comme la recherche d’une solution sur mesure, depuis la loi de 2016, la médiation est devenue un mode normal de résolution des différends. Avec tout pour elle : elle interrompt le délai de recours du juge et les prescriptions sont suspendues … Que des avantages ! Une procédure tellement souple, qu’elle peut être partielle : « par exemple, une partie peut être d’accord sur le principe de sa responsabilité, mais pas sur son quantum » explique Yvon Goutal.
Pour le magistrat Sébastien Ellie aussi, la médiation présente de nombreux avantages. Recourir au contentieux pour régler un litige, « c’est toujours brutal : par principe, le juge recherche d’abord une solution en droit, y compris en vérifiant le respect des procédures ». Hors questions touchant à l’ordre public, la médiation peut s’appliquer à tous les dossiers touchant la vie d’une collectivité territoriale.
Préserver une relation au long cours
La médiation n’est pas un outil économique, ce n’est pas son esprit. D’abord, elle procure un gain d’image. Dans le cadre d’une relation contractuelle longue, type concession de service public (DSP), elle permet de régler un litige sans entrer dans le contentieux : si l’on engage une relation longue, mieux vaut éviter dès la première difficulté, de se lancer dans une procédure contentieuse.
Contentieux des contrats : ne pas baisser la garde
« Sécurisez moi les contrats et rédigez vite un guide procédure interne ». C’est bien souvent la première demande d’un élu ou d’un DGS à son juriste territorial. Une mission certes lourde, mais qui peut aussi interroger, selon Denis Enjolras, responsable des affaires juridiques dans la région Auvergne – Rhône-Alpes : la nouvelle réglementation n’appelle –t-elle pas à plus de souplesse ?
L’avocat Manuel Delamarre appelle les juristes territoriaux à la vigilance quant à l’achèvement des recours des tiers à un contrat. Un élargissement engagé en 2007, avec le recours des candidats évincés (arrêt « Tropics Travaux » , CE 16 juillet 2007, req. n° 291545) puis élargit à tous les tiers intéressés (trilogie des arrêts «Bézier 1, 2 et 3 » : CE 28 décembre 2009, 21 mars 2011 et 27 février 2015). Une évolution jurisprudentielle qui marque certainement la fin d’un système complexe du point de vue des procédures contentieuses. « La mutation du contentieux des contrats est achevée » selon l’avocat. Mais cette stabilité ne doit pas pour autant pousser les juristes à baisser la garde. La stabilité contentieuse à un prix : une exigence accrue du juge. Celui-ci veillera toujours à maintenir cet équilibre, par essence fragile, entre intérêt général, intérêt des parties et intérêts des tiers.
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