Coup de tonnerre dans le ciel déjà bien chargé des relations Etat-collectivités. Lors de leur congrès à Orléans, le 28 septembre 2017, les patrons de région ont claqué la porte de la Conférence nationale des territoires pour protester contre la non-reconduction d’un fonds de 450 millions d’euros destinés à financer leurs interventions économiques.
Un clash suivi, quelques jours plus tard, d’une démission tonitruante. Celle de Philippe Richert, l’ancien ministre (LR) chargé des Collectivités territoriales, qui a décidé de quitter ses fonctions de président du Grand Est et de l’association Régions de France. Si ce départ est, avant tout, dû aux dissensions au sein de la droite locale, dont une partie n’a jamais accepté la fusion de l’Alsace avec la Lorraine et Champagne-Ardenne, elle traduit également, à l’évidence, une colère grandissante contre le pouvoir central.
Le pacte girondin avancé par Emmanuel Macron n’est-il pas en train de se transformer en marché de dupes ?
Les régions n’ont pas raison de parler de baisse des dotations, puisque les transferts financiers de l’Etat en leur faveur augmentent, au contraire, dès 2018. En outre, nous avons tenu l’engagement du gouvernement précédent : une part d’un impôt national, la TVA, leur est transférée, avec un accompagnement de 450 millions d’euros. Sur cette somme, 200 millions ont été inscrits dans le budget pour 2017 et 250 millions sont inscrits pour 2018. Ces 450 millions étaient un fonds exceptionnel d’accompagnement à une prise de compétence : le gouvernement a décidé de ne pas les intégrer à la base de TVA transférée. La situation budgétaire aurait, sinon, contraint à prendre de l’argent à d’autres niveaux de collectivité. Par équité, nous ne l’avons pas souhaité.
Au demeurant, la ressource TVA représentera 100 millions d’euros en plus dès l’an prochain pour les régions. Le gouvernement est prêt à travailler avec les régions, dans l’esprit d’un pacte girondin.
Quelle sera la marge de négociation des pactes financiers, fondés sur une hausse maximale de 1,2 % des dépenses de fonctionnement hors inflation des 319 plus grosses collectivités et intercommunalités ?
Ces pactes, qui portent sur environ 70 % de la dépense publique locale, prendront en compte la situation de chaque collectivité, leurs capacités d’emprunt et de mutualisation ainsi que leurs marges d’investissement, par exemple. La situation, très variable, des départements, en termes de recettes de droits de mutation à titre onéreux ou de coût des mineurs isolés et étrangers, sera aussi étudiée.
Envisagez-vous un système de bonus-malus en fonction du respect de ces pactes ?
Il est certain qu’on réfléchit dans le cadre de la Conférence nationale des territoires pour savoir si ce système peut être mis en place. C’est d’ailleurs tout l’intérêt de participer à cette instance…
L’Etat entend aussi limiter le ratio de désendettement des collectivités et exiger de leur part un niveau important d’excédent budgétaire. Toutes ces injonctions ne sont-elles pas contraires au principe de libre administration des collectivités affirmé à l’article 72 de la Constitution ?
Il ne s’agit pas d’injonctions, contrairement à ce qui se passait durant le quinquennat précédent avec la baisse des dotations venue d’en haut. C’est du dialogue et du travail en commun pour améliorer la situation du pays. Le gouvernement respecte l’esprit et la lettre de notre Constitution. Selon les interlocuteurs, le principe de libre administration n’a pas la même signification. Les régions ont réclamé et vont avoir un impôt national, tandis que pour d’autres collectivités, cela passe par l’octroi uniquement d’impôts locaux…
Au chapitre « réforme territoriale », le gouvernement va-t-il relancer les fusions de municipalités au sein de communes nouvelles ?
Oui, les communes qui fusionneront bénéficieront d’un bonus de 5 % de leurs dotations durant trois ans. Ce sera, pour elles, la cerise sur le gâteau. Mais, assurément, on ne constitue pas une commune nouvelle pour des raisons uniquement financières.
Le projet d’instaurer une police de sécurité quotidienne séduit les élus locaux. Quand verra-t-elle le jour ?
Cette police de sécurité du quotidien sera mise en place dès 2018, à travers plusieurs expérimentations. La demande est très forte : de nombreuses villes se sont déjà portées candidates. L’une des questions à laquelle nous devrons répondre est celle de l’articulation avec les polices municipales.
A ce sujet, quels sont vos projets concernant les polices municipales ?
J’ai déjà reçu les représentants des syndicats de police municipale et j’ai entendu leurs revendications, notamment sur le volet social. Ma volonté est d’y travailler rapidement, et la commission consultative des polices municipales se réunira dans les prochaines semaines afin de procéder au renouvellement de certains de ses membres. J’ai d’ailleurs répondu favorablement à la demande de l’Association des maires de France de permettre à des maires adjoints de remplacer des maires au sein de cette commission. Concernant l’armement de ces polices municipales, qui nécessite une formation solide, ou leurs missions, mon sentiment est que nous avons atteint un point d’équilibre qu’il faut maintenant préserver.
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