Situation assez rare au sein du Comité des finances locales, mardi 26 septembre. Les deux représentants des régions – Philippe Richert (LR, Grand Est) et François Bonneau (PS, Centre-Val-de-Loire) – ont quitté la salle en pleine réunion pour protester contre le contenu du projet de loi de finances pour 2018 que venait de leur présenter Gérald Darmanin, le ministre de l’Action et des comptes publics !
Un « casus belli » avec les régions
En cause, la décision du gouvernement de ne pas reconduire le fonds de 450 millions d’euros attribué l’an dernier aux régions pour financer leur nouvelle compétence de développement économique. En effet, lors de l’annonce en septembre 2016 de l’octroi d’une fraction de TVA aux régions en lieu et place de leur DGF au 1er janvier 2018, il avait été prévu un dispositif transitoire sous la forme de ce fonds de 450 millions d’euros, versé en deux fois.
Cet accord, validé par le Parlement à l’article 149 de la loi de finances pour 2017, prévoyait ensuite de calculer le montant de TVA à transférer à partir de 2018 sur la base de la DGF des régions(1) et de ce fonds de soutien de 450 millions d’euros. Or, le gouvernement estime que les régions bénéficieront déjà du dynamisme naturel de leur nouvelle fraction de TVA – estimé entre 100 et 150 millions d’euros annuels – et n’a donc pas inclu ces 450 millions d’euros dans le calcul, occasionant une perte sèche de ressources pour les régions.
Ces dernières s’estiment donc « maltraitées » par ce budget, soulignant que les régions pourraient être le seul niveau de collectivités à voir ses ressources diminuer en 2018. Dans une tribune, publiée dans « Le Monde », Philippe Richert, qui préside Régions de France, demande au président de la République et au Premier ministre de tenir leurs engagements, de « respecter la volonté du législateur » et de « faire confiance aux régions ».
Les départements sur la défensive
De son côté, l’Assemblée des départements de France ne compte pas signer un chèque en blanc au gouvernement et entend obtenir des garanties financières avant de signer un contrat avec l’Etat. « Nous n’avons rien contre si la contractualisation est réaliste. Mais ce qui nous choque, c’est le fait que nous n’ayons toujours pas réglé les dossiers des Allocations individuelles de solidarités (AIS) et des Mineurs non accompagnés (MNA). Nous ne signerons pas avant la fin de ces négociations », prévient ainsi Dominique Bussereau (LR, Charente-Maritime), le président de l’ADF.
Le Comité des finances locales unanime
Enfin, le Comité des finances locales (CFL) a dénoncé, de manière unanime selon son président André Laignel (PS), « la baisse de 13 milliards d’euros qui ne tient pas compte des efforts déjà réalisés et qui constitue un nouveau coup porté à l’investissement qui induirait obligatoirement un affaiblissement des services publics locaux. » Le CFL a également protesté unanimement contre le projet de réforme de la taxe d’habitation mais aussi contre les coupes dans les budgets des agences de bassin, dans le nombre de contrats aidés et dans les finances des organismes HLM.
« Les collectivités sont devenues une variable d’ajustement et l’Etat veut gérer les collectivités à la place des élus locaux », considère André Laignel.
Des zones d’ombres qui restent à dissiper
Au-delà des désaccords politiques, plusieurs aspects techniques du PLF 2018 restent flous et pourraient avoir des conséquences non négligeables à l’heure des comptes. Citons notamment la présence ou pas du FCTVA dans l’enveloppe normée ; la participation ou pas de l’Etat au financement de la péréquation verticale (DSU/DSR) ; le périmètre et le contenu exact des 319 contrats avec les grandes collectivités ; le périmètre des variables d’ajustement ; les transferts de crédits entre certaines missions ; le coût des mesures d’incitation aux communes nouvelles, etc. Autant d’éléments qui devraient trouver des réponses dans les prochaines semaines au Parlement.
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PLF 2018 : fiscalité et pacte financier, la nouvelle donne
Sommaire du dossier
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- Vote des cotisations minimum de CFE repoussée au 15 janvier 2018 : Promesse tenue !
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- PLF 2018 : les modifications du volet « dépenses » votées en commission à l’Assemblée
- Loi de programmation des finances publiques : attention à l’objectif de désendettement !
- PLF 2018 : les députés ont adopté le texte en première lecture
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- Le Sénat attaque l’examen du PLF en reportant la réforme de la Taxe d’habitation
- La loi de programmation 2018-2022 : un acte unilatéral
- Budget 2018 : la confiance avec les élus locaux reste à construire
- Les fonds de la réserve parlementaire ne font pas consensus
- Le Sénat desserre la contrainte financière sur les collectivités
- L’Assemblée nationale adopte le budget 2018 et la loi de programmation 2018-2022
- PLF 2018 : le relevé des articles intéressant les collectivités locales
- Loi de programmation : les députés assouplissent (un peu) les contraintes sur les collectivités
- Comment l’Etat veut contraindre les collectivités à se désendetter
- Finances publiques : ce qui attend les collectivités d’ici à 2022
- Budget 2018 : un pacte financier qui souffle le chaud et le froid
- PLF 2018 : quelles mesures et quelles menaces pour les collectivités ?
- Baisse des dépenses : Edouard Philippe officialise le scénario tendanciel
Thèmes abordés
Notes
Note 01 dotation forfaitaire + dotation de péréquation + dotation générale de décentralisation de la région Corse Retour au texte