De nombreuses collectivités ont lancé des projets ou entamé une réflexion stratégique sur la smart city. D’autres préfèrent commencer progressivement, en collectant par exemple des données à l’aide de capteurs communicants, avant d’entamer une démarche globale. Selon vous, quelle est la meilleure approche ?
La smart city n’est pas un empilement de projets, mais une manière de repenser les politiques publiques et les services urbains à l’aune du numérique. Les collectivités ne peuvent donc pas faire l’économie d’une réflexion de fond sur leur façon de mener les politiques publiques à l’ère numérique. La smart city doit prendre en compte la gouvernance, la transversalité et l’interopérabilité. Cette réflexion stratégique globale est la meilleure approche du sujet. Dans ce cadre, les collectivités doivent notamment prendre conscience de l’enjeu des données et de la nécessité de faire communiquer les réseaux, mais aussi prévoir des projets qui réunissent les services et les directions d’une même collectivité, et faire travailler ensemble plusieurs collectivités.
Comment rendre la ville intelligente ?
Plus que la ville, c’est le territoire qui doit être intelligent. Le fonctionnement en silo n’a plus de sens et on ne peut pas envisager d’être « smart » seul. Les collectivités doivent au contraire travailler en collaboration et selon plusieurs échelons d’intermédiation (intercommunalité, métropole, région…), en fonction des projets, voire des différents volets d’un même projet. En effet, l’échelle de la ville n’est pas suffisante. Par exemple, gérer la mobilité à l’échelle d’une agglomération n’a pas de sens : autour de la mobilité, il faut penser aux compétences voirie, aménagement, aux parkings en surface et souterrains, aux transports régionaux… Ce qui compte, c’est de prendre du recul. Le smart territoire impose aussi la mutualisation, qui permet notamment de répondre aux manques de ressources humaines et financières, des freins évoqués par les petites collectivités. Une mutualisation qui passe par l’adoption d’une « grammaire » d’échange commune, celle des données : elle permet de normaliser les échanges entre administrations. Il ne faut pas forcément une plateforme de données sur chaque projet, mais plutôt faire collaborer les différents services urbains entre eux sur une seule plateforme territoriale. Ainsi, pour Paris, la « maille de mobilité » gérée par la ville peut échanger ses données avec le Stif qui est en charge des transports régionaux, et avec les collectivités du territoire, la RATP, la SNCF et bien d’autres acteurs encore.
Les citoyens sont globalement très favorables aux démarches de smart city : seul un sur dix y serait réticent. Qu’en pensez-vous ?
C’est un résultat cohérent avec les constats généralement effectués par les personnes qui travaillent sur ce sujet. Et du reste, il est essentiel de recentrer les projets sur les citoyens, afin de rendre la ville intelligente plus humaine pour la mettre à leur service. Cette nécessité est apparue très récemment : auparavant, on pensait plutôt réseaux, smart grids, développement économique.
Quelle condition vous paraît indispensable à la démarche smart city ?
Il ne faut pas oublier que ce sont des projets qui demandent du temps. On ne fera pas des villes intelligentes en quelques mois, alors que certaines cités sont multimillénaires… Bien sûr, cela peut être frustrant politiquement.
Quel risque pourrait être lié aux villes intelligentes ?
Nous assistons à un véritable paradoxe : le numérique est devenu un tel enjeu de différenciation qu’on en perd de vue l’intérêt général. Or, il est indispensable de le remettre dans les politiques publiques numériques. La loi pour une République numérique et le rapport Belot sur la smart city vont dans ce sens.
Cet article fait partie du Dossier
Smart city : les clés de la ville intelligente
Sommaire du dossier
- Et si la ville intelligente n’était pas connectée ?
- Le trottoir, nouvel eldorado de la smart city ?
- Les livraisons de l’e-commerce mettent le bazar en ville
- La smart city est-elle autoritaire ?
- La ville de Montréal veut réguler l’intelligence artificielle et se rêve en chef de file mondial
- La ville selon Google est-elle transposable en France ?
- Innovation : quatrième édition pour Datacity qui va changer d’échelle
- Ville intelligente : une modélisation des impacts à affiner
- L’information est la matrice de la ville intelligente
- Smart city : bientôt une bataille de la donnée
- Les villes moyennes peuvent aussi être des villes intelligentes
- Ville intelligente : les enjeux du financement de la numérisation des collectivités
- Rueil-Malmaison mise sur la blockchain
- Construire son smart territoire, intelligemment
- Smart city : rassembler les données en vue de piloter la ville
- La smart city, du rêve à la réalité
- Traiter les données, un défi pour construire les territoires intelligents
- Les intelligences de la smart city
- Le potentiel d’un territoire révélé grâce aux données
- Smart city : les données utilisées doivent être interrogées
- A l’étranger aussi, les villes testent et se transforment en laboratoire
- Data city : duel public-privé autour de la donnée locale
- Data city : A l’heure des data, « l’ubérisation » de l’intérêt général menace
- Data city : équipes, outils, budget…, à chaque collectivité son organisation
- Les grands moyens pour redynamiser une ville sur le déclin
- Data city : « Une nouvelle structure de confiance pour superviser le traitement des données »
- La smart city, à quel prix ?
- Services urbains numériques : la clé, c’est le partage des données
- Smart city : « L’hyper-technicisation laisse peu de place au citoyen »
- Les promesses à double tranchant de la ville intelligente
- Avec son contrat multiservice, Dijon dessine la ville d’après-demain
- Les collectivités locales méconnaissent les métiers du numérique
- « Permettre aux collectivités d’avoir accès à des données collectées par des acteurs privés »
- Les collectivités désarmées face à Uber et Airbnb
- A la recherche du citoyen intelligent
- Une smart city de 10 000 habitants, c’est possible et rapidement rentable
- La ville intelligente, une big mother en puissance ?
- La smart city, ce n’est pas que pour les grandes villes !
- La ville numérique : progrès social ou empilement technologique ?
- « Il faut rendre la smart city humaine »
- « Il faut créer un statut pour les données d’intérêt territorial » – Luc Belot
- La Smart city à la recherche de modèles économiques
- « La smart city doit être construite avec le citoyen » – Gaël Musquet
- La smart city, un concept qui a du mal à éclore
- Retour sur investissement : la smart city est-elle une bonne affaire ?
- Google, fournisseur officiel de services publics
- « Smart water » : comment le partenariat entre Veolia et IBM préfigure l’évolution des services urbains
- Maîtriser la donnée, un enjeu central pour la ville intelligente
- L’innovation ouverte, un concept au cœur de la ville intelligente
- Living Labs : l’innovation par l’usage
- Éclairage public : vous avez dit smart ?
- Objets connectés : de l’optimisation de coûts aux services de demain (1/4)
- Les objets connectés, mais de quoi parle-t-on ?
- Objets connectés : « C’est à chaque collectivité de définir les solutions qui lui semblent pertinentes » (4/4)
- L’entrepôt de données publiques-privées, prochain graal ou nouvelle usine à gaz ?
- Smart city, smart passoire potentielle
- Objets connectés : le regroupement des données aide à mieux œuvrer pour le bien commun (2/4)
- Pense-bête pour sécuriser sa ville intelligente
- Smart city : un portage politique fort pour monter des projets transversaux
- Objets connectés : un développement tous azimuts exige des démarches cohérentes (3/4)
- Smart city : la formation des agents, un passage obligé pourtant négligé
- Smart city : « Réfléchir avec attention, de façon collective et sciemment » aux objectifs assignés à la technologie
- La communauté urbaine de Lyon met les données au coeur de sa stratégie smart city
Thèmes abordés