Soumettre la passation des conventions d’occupation domaniale à des obligations de publicité et de mise en concurrence préalables serait-il synonyme de renonciation de l’acception traditionnelle de la domanialité publique ? Doit-on en finir avec les notions d’intérêt général et de prérogatives de puissance publique propres au domaine public ? Telles sont les questions que pose aujourd’hui la réforme de la domanialité publique, issue notamment de l’ordonnance n° 2017-562 du 19 avril 2017 relative à la propriété des personnes publiques.
Evolution inévitable
Prise en application de l’article 34 de la loi « Sapin 2 » du 9 décembre 2016, cette ordonnance semble tourner définitivement une page du droit administratif français. Alors, hier encore, outil au service de l’intérêt général, le domaine public serait-il devenu un objet économique avec pour vocation première de permettre aux opérateurs privés d’y développer des activités marchandes ? Oui, semblent dire d’une même voix doctrine et jurisprudence depuis les années 1990. Car, animée par des impératifs de valorisation et de meilleure exploitation, la domanialité publique revêt désormais une coloration économique très marquée.
En effet, les conventions d’occupation domaniale permettent aux opérateurs privés, moyennant redevance, d’y exercer une activité marchande. Sauf que, faute d’obligation de publicité et de mise en concurrence préalables, les autorités gestionnaires du domaine étaient susceptibles de fausser le jeu de la concurrence entre les opérateurs économiques. Ce qui avait été d’ailleurs condamné (1) l’été dernier par la CJUE et qui a amené la législation française à évoluer.
Obligation avec exceptions
Ainsi, l’ordonnance du 19 avril, applicable au 1er juillet 2017 complète de deux alinéas l’article L.2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques. Il prévoit désormais que, lorsque les titres d’occupation permettent à son titulaire d’occuper ou d’utiliser le domaine public en vue d’une exploitation économique, « l’autorité compétente organise librement une procédure de sélection préalable présentant toutes les garanties d’impartialité et de transparence, et comportant des mesures de publicité permettant aux candidats potentiels de se manifester ».
Toutefois, quand l’occupation est de courte durée, il n’est pas nécessaire de procéder à une publicité préalable, de même si plusieurs occupations peuvent être simultanément délivrées sur une dépendance du domaine public. De plus, l’article L.2122-1-2 fixe quatre situations où ces obligations de publicité et de mise en concurrence ne seront pas applicables.
Enfin, on peut regretter que la réforme de la domanialité publique reste muette sur les modalités de publicité et la procédure de sélection à mettre en place, et se contente de rappeler les principes à respecter. Ce qui, espérons-le, est une invitation au pouvoir réglementaire à intervenir…
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