A mesure que l’absentéisme progresse, de manière inexorable, les commentaires abondent pour en désigner les causes, les plus fréquemment avancées étant le vieillissement des effectifs, en général, et la pénibilité du travail, pour certains métiers. A croire que les collectivités territoriales et leurs établissements publics ont inversé leur pyramide des âges, et que la pénibilité est une contrainte inhérente à l’exercice d’un emploi public ! Un peu court…
Il suffira de pousser l’analyse un peu plus loin pour constater que les plus âgés des agents ne sont pas nécessairement les plus souffrants, encore moins lorsqu’il s’agit de maladie ordinaire, et que la pénibilité n’est pas, ici plus qu’ailleurs, féconde en arrêts de travail.
Se départir de tout angélisme
Une enquête visant les employeurs locaux pourrait également permettre de distinguer entre ceux qui ne vérifient pas le bien fondé des absences pour maladie ordinaire et se refusent à tout contrôle, et ceux qui ont mis en place, parfois depuis des lustres, un régime indemnitaire dont certains éléments tiennent compte, en tout ou partie, des absences. La démarche des seconds se trouve confortée, a contrario, par la suppression du jour de carence, une décision qui a poussé l’absentéisme vers de nouveaux sommets, notamment en matière de congés de maladie ordinaire. Ne nous voilons pas la face. Les fonctionnaires sont des hommes et des femmes comme les autres, avec leurs qualités et leurs faiblesses. Sensibles à l’incitation, ils ne sont pas insensibles à la sanction.
Alors que faire ? D’abord se départir de cet angélisme qui voit l’innocence partout et le péché nulle part. Ensuite, revenir, dans ce domaine précis, à une notion à la fois plus rigoureuse et plus généreuse de la gestion des ressources humaines. Dans les collectivités les plus importantes, on fera en sorte que l’absence ne soit plus « invisible », voire compensée, pour ne pas dire masquée par des effectifs suffisants ; ce qui, soit dit en passant, n’est pas possible dans une petite commune.
L’agent absent doit être conscient que ses fonctions ou tâches seront réparties entre ceux qui sont à leur poste et contraints d’accepter ce surcroît de travail pour garantir la continuité du service public. Au nom de l’égalité de traitement entre les agents, les expertises médicales doivent être activées, le cas échéant réactivées, dans le cadre d’une procédure parfaitement encadrée par les textes. Enfin, les sanctions appropriées seront fermement appliquées et connues.
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Revaloriser le travail des agents
Ceci étant, une analyse des absences en fonction des catégories de fonctionnaires désignera les agents de la catégorie C. C’est évident ; pas seulement parce qu’ils sont les plus nombreux, mais parce qu’ils se partagent les tâches les moins gratifiantes et les métiers les plus pénibles. Aussi aucun progrès ne sera-t-il accompli si ces agents ne sont pas revalorisés dans leur emploi ou dans leur métier.
D’où la nécessité d’enrichir le contenu des tâches des uns et d’alléger le travail des autres ; ici, avec le renfort de la numérisation des travaux les plus répétitifs, là par la mécanisation de certaines interventions. Il s’agit de faire en sorte que chaque agent se sente utile et considéré.
Les organisations syndicales, qui portent leur part de responsabilité dans une justification assez systématique et complaisante de l’absentéisme, seront, bien entendu, associées à cet aspect de la gestion des ressources humaines, sur la base de ce principe élémentaire : un agent qui s’identifie à son travail et qui est bien dans son bureau ou sur son chantier est un peu moins absent.
Enfin, pour revenir aux causes de cet absentéisme, on regrettera que certains employeurs locaux aient appris à « vivre avec », comme on s’accommode d’une maladie incurable, ignorant parfois que le remède existe et qu’il figure en toutes lettres dans le statut.