L’innovation managériale est dans l’air du temps. Certains objecteront – peut-être à raison – qu’il ne s’agit là justement que d’air… L’innovation est encore trop souvent ce concept-écran opportun, qui permet à certains de faire l’économie d’une pensée critique à l’encontre du – de leur – management.
Il n’est pas très difficile de se draper dans l’innovation pour s’offrir, à peu de frais, un vernis de modernité. Mais il peut aussi s’agir d’une véritable ambition de remise en mouvement de nos pratiques, le but du jeu étant, dans ce cas, de faire différemment pour sortir par le haut des contraintes qui pèsent sur nos organisations.
Le Lab’ AATF
Comment, alors, séparer le bon grain de l’ivraie ? Deux éléments peuvent poser les bases d’une évaluation : l’usage et l’utilité. Une nouveauté qui ne rentre pas dans les pratiques de l’organisation, ce n’est pas une innovation mais un discours. L’autre critère est celui de la finalité : pour éviter l’effet gadget, il faut que l’innovation soit au cœur des enjeux du collectif et non pas à leur périphérie.
A la suite du congrès de l’Association des administrateurs territoriaux de France (AATF) de 2015, nous avons souhaité créer un dispositif continu de soutien aux expérimentations managériales dans les collectivités : le Lab’ AATF. Un appel à innovation a été lancé par l’association, et une douzaine de collectivités et d’établissements publics, répartis sur tout le territoire national, ont répondu présent.
Grand sérieux dans la méthode
Quelques modestes enseignements peuvent déjà être tirés des premières expérimentations du Lab’ AATF. Celles-ci n’ont pas eu une cible unique, car elles s’attaquaient à une diversité d’enjeux, souvent majeurs pour l’organisation : responsabilisation collective dans la recherche d’économies, réforme participative du temps de travail, nouvelle gouvernance territoriale au sein des établissements publics territoriaux du Grand Paris. D’autres ont plutôt fait le choix de tester de nouveaux outils pour les managers (évaluation 360°, management visuel, ethno-méthodes, etc.) pour essayer de résoudre les problèmes par la base.
Ensuite, l’innovation publique, parfois caricaturée comme champ d’idéalistes, nécessite en réalité un grand sérieux dans la méthode et certains investissements, notamment en capital humain. Ici, on ne saura trop inciter les recruteurs publics à plus s’intéresser à ces métiers émergents et compétences de l’innovation, du designer de service public au conseiller en organisation.
Enfin, le portage hiérarchique (et politique) de l’innovation n’est pas gagné d’avance, et c’est tant mieux. Si certains dirigeants prennent le sujet à bras-le-corps, d’autres le regardent avec circonspection. Personne n’a jamais prétendu que l’innovation était un long fleuve tranquille, c’est un combat qui ne peut se gagner que par la preuve et non par l’effet de manche.
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