Le Conseil d’Etat a donc rendu sa décision le 26 août : l’arrêté pris par le maire de Villeneuve-Loubet doit être suspendu, aucune menace de trouble à l’ordre public ne résultant de la présence de femmes en « burkini » sur une plage. Une réponse juridique qui n’éteindra certainement pas le feuilleton surmédiatisé et particulièrement clivant de cet été. D’autant qu’en cette période de rentrée politique, il a le don d’aiguiser les postures électoralistes.
Réponse juridique
La question posée au juge était classique. Le maire a-t-il correctement évalué le risque de trouble à l’ordre public et envisagé tous les moyens à sa disposition avant d’opter pour l’interdiction ? Sur les bancs des facs de droit, c’est un sujet de commentaire courant (arrêt « Benjamin » (1933), plus récemment affaire « Dieudonné »). La première question est de savoir si cette décision sera efficace. Sur le court terme, oui : les maires ne pourront prendre de nouvelles interdictions qui ne seraient automatiquement annulées. Politiquement en revanche, rien n’est réglé.
Les feux allumés ont été attisés par le vent de la peur. Pour le Conseil d’Etat, « l’émotion et les inquiétudes résultant des attentats terroristes ne sauraient suffire à justifier légalement la mesure d’interdiction ». Les politiques en campagne ne manqueront pas de souffler sur les braises. La solution doit se trouver ailleurs, ne serait-ce que parce que le rôle du juge n’est pas d’écrire la loi, mais de la faire respecter.
Questions politiques
Faut-il, pour éteindre l’incendie, une nouvelle « loi de circonstance » ? Quel en serait alors le contenu ? Le pacte social doit-il autoriser l’affichage public de ses croyances, quitte à favoriser le prosélytisme et les excès communautaristes ? Doit-il permettre l’ingérence pour lutter contre l’asservissement de la femme et pour son émancipation ? En creux, la loi fondatrice de 1905 sur la laïcité est-elle encore en mesure d’appréhender les phénomènes de radicalisation, les dérives sectaires et les appels à l’intolérance auxquels toutes les religions peuvent succomber ? Assurément oui, pour peu que le politique ne la fragilise pas, et l’utilise, dans toute sa force.