« J’ai décidé de diminuer de moitié l’effort demandé aux communes et intercommunalités en 2017 », a déclaré le chef de l’Etat en clôture du 99e congrès des maires, suscitant un mélange d’applaudissements et de huées dans l’assistance. L’an prochain, la baisse des dotations au bloc communal ne sera donc que d’un milliard d’euros au lieu de deux. Le montant resterait inchangé pour les départements et les régions.
Cette annonce est assortie d’un nouveau « fonds exceptionnel de soutien à l’investissement » doté de 1,2 milliard d’euros en 2017, contre 1 milliard en 2016. La moitié sera fléchée vers la transition énergétique, le logement et l’accessibilité et l’autre moitié sera réservée aux petites villes et comprendra notamment une hausse supplémentaire de 200 millions de la DETR (qui atteindra donc 1 millliard d’euros en 2017 contre 816 millions en 2016 et 616 millions en 2014).
Texte dédié pour la réforme de la DGF
Enfin, répondant à une autre revendication majeure des associations d’élus, le président de la République a annoncé « qu’un texte de loi spécifique à la réforme de la DGF sera présenté. Il ne s’agit pas de repousser la réforme mais de faire bien et d’en corriger les défauts ». Pour y contribuer, l’Observatoire des finances et de la gestion publique locale sera installé cet automne. « Toutes les données vous seront transmises. Tout sera clair, tout sera transparent et donc tout sera juste », promet le président de la République.
Mais François Hollande a également réservé d’autres surprises aux élus locaux. « La gestion du FCTVA est aujourd’hui entièrement manuelle et emploie 3000 personnes. L’automatisation sera mise en œuvre dès 2017 »,a-t-il indiqué avant d’annoncer que « les incitations financières pour la création de communes nouvelles seront maintenues jusqu’à la fin de l’année 2016 ».
« Il faut faire en sorte de dire que nous avons ensemble réduit les déficits de comptes publics », a conclu François Hollande.
« La baisse des dotations, une erreur économique »
Des annonces qui répondent, au moins en partie, aux demandes et à l’inquiétude des nombreux maires présents au congrès. « L’effort demandé aux collectivités locales est injuste, intenable, cela va trop vite et trop fort », a attaqué François Baroin, le président (LR) de l’AMF, lors d’un discours incisif, qui rappelle que « le bloc communal porte 60 % de l’investissement » et « ne produit pas de déficit puisqu’il n’en a pas le droit ». La baisse des dotations est « une erreur économique qui demande l’effort le plus important à l’acteur le plus véloce sur l’investissement […] et qui détruit des emplois : sauvez ces emplois monsieur le président ! », a-t-il poursuivi à l’adresse du chef de l’Etat, avant d’ajouter :
« Nous vous demandons l’annulation de la baisse des dotations en 2017. Nous vous demandons la suppression des frais de gestion et d’assiette des impôts locaux et la simplification du FCTVA. L’enjeu est de plus d’un milliard d’euros. »
Le président de l’AMF a également requis « que l’Etat finance à 100 % le coût de la réforme des rythmes scolaires et, plus largement, la compensation intégrale de toutes les compétences transférées ».
Des maires aux attentes très fortes
Il fallait au moins ces annonces pour calmer une colère qui était palpable dans les travées du congrès. Charles Scibetta, maire de Carros (Alpes-Maritimes), adressait ainsi quelques heures plus tôt un carton rouge « au président de la République, au gouvernement, aux parlementaires et à l’AMF » sur la question des dotations : « Vous ne nous avez pas assez défendus ! », jetait-il ainsi à la tribune. « Nous en prenons acte », répondait sobrement Philippe Laurent, secrétaire général de l’AMF et maire (UDI) de Sceaux (Hauts-de-Seine), reprenant à son compte le flot des critiques : « On ne peut pas assumer à la fois la baisse des dotations et la hausse des dépenses et charges qui nous sont imposées par l’Etat : normes, rythmes scolaires, accessibilité, etc.. », abonde-t-il.
« La chute de l’investissement a été la première conséquence de la baisse des dotations. En 2014, le Sénat avait prédit un repli de 30 % et on en est déjà à 25 % en seulement deux ans malgré les dénégations de Bercy », ajoute Philippe Dallier. Le sénateur-maire (LR) des Pavillons-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) demandait « deux choses : la suppression de la dernière tranche de l’extrême ponction et l’accomplissement de la réforme de la DGF. La réforme actuelle ne tourne pas, il faut la réécrire. »
« Investir ce n’est pas renoncer au sérieux budgétaire »
Appuyant les colères de la salle, le député-maire de Vierzon (Loir-et-Cher), Nicolas Sansu, reconnaît que l’effort demandé aux élus « n’en vaut pas la chandelle : 11 milliards de baisse de dotations, c’est aussi plus de 5,5 milliards de recettes fiscales en moins et presque autant via les pertes d’emplois. Le gain pour le gouvernement est minime », lâche-t-il. Dans la salle, témoignages de colère, de sentiment d’injustice ou même d’incohérences se succédaient. Françoise Briniazet, première adjointe au maire de Salaise-sur-Sanne (Isère), déplorait par exemple subir une « DGF négative » en 2016, qu’elle estime « proche de l’illégalité ». Patrick Genre, le maire de Pontarlier (Doubs), s’exaspérait de son côté d’une « augmentation de 1 612 % de sa contribution au FPIC ».
« J’attends que l’on nous prouve que nous avons des personnels inutiles et alors oui nous ferons des économies de personnels mais il n’y a pas un agent de nos mairies qui ne soit employé au service du public », jure Michel Vergnier, maire de Guéret (Creuse) mais également trésorier de l’AMF.
« Faire le choix de l’investissement ce n’est pas renoncer au sérieux budgétaire, au contraire », affirme également Anne Hidalgo, la maire (PS) de la capitale, qui poursuit : « Notre capacité d’autofinancement est essentielle et nous arrivons au bout au bout des efforts que nous pouvons faire en matière d’économies sur les dépenses de fonctionnement. »
La résolution commune de l’AMF : « Affaiblir la commune est une faute »
La résolution commune, adoptée à l’unanimité du bureau de l’association, demande le respect de la place centrale de la commune – « affaiblir une commune est une faute » – ; l’arrêt de la baisse des dotations en 2017, qualifié de « priorité nationale » ; une réforme soutenable, lisible et juste de la DGF ; un coup d’arrêt à l’inflation des normes et au transfert de charges ; une plus grande concertation entre l’Etat et les collectivités ; une réponse urgence aux difficultés des collectivités d’outre-mer ; et une plus grande fermeté dans les négociations du traité TAFTA. Autant d’éléments qui seront repris dans « une charte pour l’avenir des communes de France » qui sera soumise aux candidats à l’élection présidentielle de 2017.
L’AMF apporte par ailleurs son soutien à la candidature de Paris pour accueillir les Jeux olympiques de 2024.
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Congrès des maires 2016, l'année des bonnes nouvelles ?
Sommaire du dossier
- Maires de France : l’unité est un combat
- Dotations : l’AMF espère « une bonne nouvelle » au Congrès des maires
- Hé oh monsieur le Président !
- Dotations : des milliards pour des projets et des discordes
- « La baisse des dotations au bloc communal sera réduite de moitié »
- [Vidéo] Dotations : François Baroin réagit aux annonces de François Hollande
- [Vidéo] Malgré les promesses de François Hollande sur les dotations, les maires toujours inquiets
- [Vidéo] Allez-vous réduire votre offre de services publics après la baisse des dotations ?
- Les associations d’élus veulent une loi de financement des collectivités
- Fonction publique et réforme territoriale : les associations d’élus contre la surenchère
- Maxi-intercommunalités et mini-maires
- Les maires face à l’urgence culturelle
- Très haut débit : aller plus vite, partout, oui mais comment ?
- Christian Eckert : « Prolonger le fonds d’investissement est une piste »
- L’AMF déplore un repli de 25% de l’investissement communal en 2 ans
- Construire un nouveau mythe de la ruralité
- Les GHT n’enflamment pas les maires
- [Vidéo] L’intercommunalité doit-elle remplacer la commune ?
- [Vidéo] Faut-il supprimer des postes de fonctionnaires dans votre commune ?
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