L’examen du marché de l’emploi dans les intercommunalités montre un dynamisme certain ainsi qu’une nécessaire montée en compétences, selon le baromètre des bourses de l’emploi public local, que « La Gazette » publie en exclusivité, en partenariat avec la FNCDG et l’ANDCDG.
Dans un marché de l’emploi en berne, il est un type de collectivités locales atypiques. Selon le baromètre des bourses de l’emploi public local, que « La Gazette » publie en exclusivité, en partenariat avec la Fédération nationale de centres de gestion (FNCDG) et l’Association nationale des directeurs et directeurs adjoints des centres de gestion (ANDCDG), les communautés urbaines et les métropoles ont vu leur nombre d’offres d’emploi publiées progresser de 26,4 % entre 2014 et 2015.
Source: ANDCDG, traitement des bourses de l’emploi des CDG – Infographies P. Distel/La Gazette
« Les intentions de recrutement sont un peu supérieures dans les intercommunalités. Selon notre enquête sur les tendances de l’emploi territorial (1), 31 % des intercos ont pour projet de recruter en 2016, contre 17 % des collectivités en moyenne », indique Christophe Lepage, directeur de l’observation prospective des emplois, des métiers et des compétences au CNFPT.
Métiers de l’urbanisme
Pour Thierry Senamaud, directeur de la FNCDG, la fin de la mise à disposition des services de l’Etat pour l’application du droit des sols aux communes appartenant à des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) qui comptent plus de 10 000 habitants, est en partie en cause.
« Les contraintes budgétaires ont obligé nombre de communes à déléguer la compétence de délivrance des autorisations. Beaucoup de services communs ont été créés, ce qui explique que le métier d’instructeur des autorisations d’urbanisme ait été le plus recherché en 2015. »
« Les intercommunalités sont à la recherche de deux types de profils, précise Christophe Lepage. Généralistes, pour faire travailler ensemble l’urbanisme, l’aménagement, le développement économique ; et hyperspécialisés, sur le foncier et les opérations d’aménagement complexes, par exemple. »
La mise en place de l’aménagement des rythmes scolaires constitue aussi l’une des principales raisons de recrutement des organismes intercommunaux en 2015. Ainsi, de nombreuses offres d’emploi dans les enseignements artistiques ont été publiées, mais seulement 16 % concernent des postes à temps complet.
Mise en œuvre des schémas de mutualisation
Parmi les autres raisons du dynamisme de l’emploi, la FNCDG évoque la mise en œuvre des schémas de mutualisation. « De nombreuses communautés d’agglomération, communautés urbaines, métropoles et même communautés de communes ont recruté des agents, surtout sur des contrats de trois ans, nommés sur des grades d’attachés ou de rédacteurs, pour assurer le suivi de l’élaboration et de la mise en œuvre du schéma de mutualisation », relate Thierry Senamaud.
La loi « Notre » et les reconfigurations territoriales sont aussi créatrices d’emploi : « Toutes ces transformations doivent être anticipées et des réflexions sont engagées, parallèlement aux problématiques de fusions, sur des nouveaux projets de territoire, ce qui explique le recrutement important de chargés du développement territorial. »
« Les besoins sont conséquents, confirme Floriane Boulay, responsable des affaires juridiques à l’Assemblée des communautés de France. Les formations initiales à l’université sont nombreuses, mais ces personnels manquent de culture juridique pour passer les concours d’attaché ou de rédacteur. Et les formations de réorientation des agents en poste ne sont pas très développées. »
Les situations de l’emploi sont en réalité « extrêmement variables, insiste Christophe Lepage. Les métiers sont très divers. Plus de 200 métiers sur les 233 du répertoire des métiers sont représentés dans les intercos, avec un métier caractéristique : agent de collecte des déchets ».
Parmi les métiers actuellement en tension, le spécialiste cite : les animateurs et éducateurs sportifs, les instructeurs des autorisations d’urbanisme et les techniciens bâtiment. Les intercommunalités en voie de restructuration concernées par les extensions de périmètre recherchent aussi beaucoup de profils sur des fonctions support.
Quatre axes de développement
Dans un contexte mouvant, Christophe Lepage imagine quatre axes de développement : un renforcement des compétences stratégiques d’aménagement et de développement du territoire, des nouvelles compétences liées à la loi « Notre » (déchets, eau et assainissement, gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations), mais aussi une montée en charge des métiers liés aux changements de périmètre (chef de projet « système d’information géographique », par exemple) et de ceux qui vont connaître des évolutions très fortes (numérique, énergie et paysages-espaces naturels).
Top 10 des cadres d’emploi qui sont le plus souvent demandés dans les offres publiées sur l’année 2015
Variation, par région, du nombre d’offres d’emploi publiées (2015/2014)
« Ces transformations nécessitent un accompagnement »
Pricillia pascale, responsable du conseil en organisation du pôle « analyses et prospectives » du centre de gestion de Meurthe-et-Moselle
Les intercos, comme les départements et les régions au moment de l’acte II de la décentralisation, connaissent actuellement un quasi-doublement de leurs effectifs. Ces transformations nécessitent un accompagnement en termes de montée en compétences qu’il est important d’évaluer. La plupart des directeurs généraux prennent la mesure de ces changements et se préparent. Quelques-uns sont encore dans l’attente. Des directeurs de service technique, qui ont aujourd’hui un rôle de chef de service, vont devoir élargir leurs compétences.
Les intercos devront rendre davantage des comptes, faire des études de coûts, de la prospective, des chartes de gouvernance, etc. Elles sont touchées par un mouvement global de modernisation et de professionnalisation.
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