Un nationaliste rafle une région ce 13 décembre. Mais contrairement à ce que pouvaient laisser envisager les résultats du premier tour, le 6 décembre, il n’est pas issu du FN. Victorieux en Corse, Gilles Simeoni menait, au second tour, une liste rassemblant les différentes chapelles du nationalisme insulaire.
Cette édition 2015 des régionales, marquée par un sursaut de la participation entre les deux tours (59,5 % le 13 décembre contre 49,1 % le 6 décembre), est celle de toutes les surprises.
L’alliance LR / UDI / MODEM relève la tête. Témoin, le succès sur le fil de l’UDI Hervé Morin en Normandie (36,4 % contre 36,1 % au profit du socialiste Nicolas Mayer-Rossignol).
A la faveur du retrait du PS, la droite engrange deux autres succès face au Front National. En Nord-Pas-de-Calais /Picardie, elle creuse un écart de plus de 15 points : 57,8 % pour Xavier Bertrand (LR) contre 42,2 % en faveur de Marine Le Pen (FN).
Des électeurs FN en renfort pour Valérie Pécresse
Plus surprenant, le « droitier » Christian Estrosi (LR) fait aussi le plein des voix de gauche. Il l’emporte aussi assez facilement en Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA) face à Marion Maréchal-Le Pen : 54,8 % contre 45,2 %.
En Alsace / Lorraine / Champagne-Ardenne, le score honorable (15,5 %) de Jean-Pierre Masseret (Divers gauche), qui s’était maintenu au second tour malgré les injonctions de la rue de Solférino, ne change rien. Philippe Richert (LR) devance largement le FN Florian Philippot (48,4 % contre 36,1 %).
Dans le même temps, Bruno Retailleau (LR) reprend les Pays de la Loire à la gauche.
Enfin, le parti Les Républicains s’empare de Rhône-Alpes / Auvergne ainsi que l’Ile-de-France. Un dernier succès acquis grâce au report d’une partie des électeurs du FN (- 4,4 points entre le premier et le deuxième tour pour le candidat Front National Wallerand de Saint-Just) vers l’UMP Valérie Pécresse (43,8 %). Un phénomène auquel n’est sans doute pas étranger le propos de Claude Bartolone (42,2 %) accusant son adversaire de droite de défendre « la race blanche »…
Au final, la droite remporte ces régionales. Cerise sur la gâteau, elle se trouve à la tête des trois régions les plus peuplées du pays : Ile-de-France, Rhône-Alpes / Auvergne où s’impose Laurent Wauquiez (LR) et Nord-Pas-de-Calais / Picardie.
L’échec de la candidate d’Alain Juppé
Mais avec 5 régions métropolitaines sur 13, la gauche résiste mieux qu’aux départementales (34 présidences sur un total de 101). Le meilleur exemple de cela ? Le Centre / Val-de-Loire : après avoir été défaite au printemps dans tous les départements, la gauche gagne d’un cheveu. Le sortant (PS) François Bonneau (35,4 %) distance de seulement 0,8 % l’UDI Philippe Vigier (34,6 %).
Dans la région Bourgogne / Franche-Comté, promise à la droite depuis des mois, la gauche incarnée par Marie-Guite Dufay (34,7 %) bat un autre UDI, François Sauvadet (32,9 %). De quoi, pour certains élus LR, s’interroger sur les têtes de liste accordées aux centristes…
Par ailleurs la gauche maintient ses positions dans le Grand Ouest, placé à l’abri des ravages de la désindustrialisation. En Bretagne, Jean-Yves Le Drian (PS) obtient, et de loin, le meilleur score de ce second tour dans une triangulaire : 51,4 %.
En Aquitaine / Limousin / Poitou-Charentes, l’expérimenté Alain Rousset (PS) repart pour un quatrième mandat à la tête de la région. La candidate d’Alain Juppé (LR), Virginie Calmels (LR) enregistre un sévère revers (34,1 % contre 44,3 % à son adversaire).
Fusionnées, les régions Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon restent dans l’escarcelle de la gauche. La nouvelle patronne de l’ensemble, Carole Delga (PS), 44 ans, incarne la seule marque de renouvellement parmi les présidents socialistes de région. Tous quatre sexagénaires, ses collègues PS étaient en effet déjà en place.
Troisième tour en deux temps
Sans réserve de voix venues d’autres partis, le FN ne parvient pas à percer le plafond de verre du second tour. Il se maintient cependant juste en dessous de la barre des 30 %, battant au passage son record de suffrages (6,8 millions contre 6 au premier tour). Il triple son nombre de conseillers régionaux (358, contre 110 en 2010), ce qui devrait un peu plus favoriser Marine Le Pen dans sa quête des 500 signatures pour postuler à la présidentielle.
En PACA et en Nord-Pas-de-Calais / Picardie, le Front National constituera même la seule force d’opposition.
Dans les six régions métropolitaines qui n’ont pas fusionné, le troisième tour se déroulera le 18 décembre. Cela concerne :
- Ile-de-France,
- Corse,
- Centre,
- Bretagne,
- Provence-Alpes-Côte d’Azur
- et Pays de la Loire.
Dans les sept nouveaux ensembles, l’élection à la présidence aura lieu le 4 janvier. Sont concernées les nouvelles régions suivantes :
- Aquitaine / Limousin / Poitou-Charentes,
- Alsace / Lorraine / Champagne-Ardenne,
- Nord-Pas-de-Calais / Picardie,
- Languedoc-Roussillon / Midi-Pyrénées,
- Bourgogne / Franche-Comté,
- Normandie
- et Rhône-Alpes / Auvergne
Le renouvellement de la présidence et du bureau de l’Association des régions de France (ARF) est, lui, programmé le 26 janvier.
La droite se trouve position de force. Elle détient neuf régions (Ile-de-France, Provence-Alpes-Côte d’Azur, Pays de la Loire, Alsace / Lorraine / Champagne-Ardenne, Nord-Pas-de-Calais / Picardie, Normandie et Rhône-Alpes / Auvergne, La Réunion et Mayotte) contre 7 à la gauche (Centre, Bretagne, Aquitaine / Limousin / Poitou-Charentes, Languedoc-Roussillon / Midi-Pyrénées, Bourgogne / Franche-Comté, Guadeloupe et Guyane).
La droite ne dispose cependant pas de la majorité absolue, deux autres régions étant aux mains de nationalistes : Gilles Simeoni (Corse) bien sûr, mais aussi Alfred Marie-Jeanne (Martinique).
Le soutien de Dominique Bussereau à Bruno Retailleau
Pour présider l’ARF, deux noms, à ce stade, circulent au sein de l’opposition. Seul président de droite déjà en poste avant le scrutin, l’ancien ministre des collectivités territoriales (2010-2012), Philippe Richert ne cache pas ses ambitions. « Cela peut m’intéresser. J’ai vu combien elle (NDLR : l’ARF) n’avait pas été efficace avec ce gouvernement. Je suis reconnu et respecté, y compris par la gauche », a-t-il confié durant la campagne à L’Opinion.
L’actuel patron de l’ARF, Alain Rousset (PS), se montre plutôt acquis à la candidature de Philippe Richert. De là à imaginer un soutien de l’ensemble des présidents la gauche, il y a un pas…
A la veille de la primaire pour la présidentielle, Nicolas Sarkozy se mêlera sans doute du scrutin. A ce stade, on ne lui connaît pas de favori. Bruno Retailleau pourrait mettre tout le monde d’accord.
L’ancien lieutenant de Philippe de Villiers est apprécié de l’aile droite du parti, mais pas seulement. Patron du groupe LR au Sénat, ce partisan de François Fillon séduit aussi parmi les modérés. Lorsqu’on évoque la présidence de l’ARF, le patron de l’Assemblée des départements de France, Dominique Bussereau n’hésite pas longtemps. « Un garçon comme Bruno Retailleau serait indiqué. Il sait parler avec l’Etat et les élus. Il n’a rien d’un excité. C’est un sénateur. Un sage. » Un soutien de poids parmi les associations d’élus locaux, mais la prudence reste de mise. Pour l’heure, Bruno Retailleau n’a pas fait acte de candidature.
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