En 2009, vous avez mené de front et en seulement un an, la création de la Communauté Urbaine de Nice et la mutualisation des directions ressources de la ville et de la CU. Comment avez-vous procédé ?
Nous avons commencé par faire un état des lieux du fonctionnement et de la structuration des entités concernées. Un état des lieux « honnête » en s’appuyant sur les mêmes postulats. Il faut absolument mettre les mêmes choses derrière les mêmes mots. C’est quoi un effectif par exemple ? Nous avons mis en place une hot-line pour les cas individuels, organisé des réunions collectives d’information par direction et des simulations individuelles de salaires. Au final, les agents ont perdu un à deux jours de congés exceptionnels. En contrepartie, ils ont bénéficié d’un régime indemnitaire globalement plus favorable, avec des parts fixes inférieures et des parts variables supérieures, et plus d’avantages sociaux (titres restaurants, participation mutuelle…). Ce levier financier nous a évidemment beaucoup aidé.
Quel bilan tirez-vous de cette expérience ?
Certes nous avons réussi à tenir les délais qui nous avaient été fixés. Mais la mutualisation de la gestion aura au final pris trois ans et le rapprochement culturel dix ans. Au-delà de l’évolution de l’organigramme des directions mutualisées, il restait ensuite beaucoup à faire pour concrétiser au quotidien les évolutions organisationnelles.
La réussite a reposé sur une commande politique claire, forte, bornée dans le temps, incarnée par un élu référent. Il faut aussi travailler en ateliers selon une méthode participative, de manière progressive, avec une bonne connaissance des existants et des projets. Nous avons tenu un discours de vérité aux agents. Il faut assumer le changement, aller au devant des personnels impactés, et toujours communiquer, expliquer, communiquer, expliquer, communiquer, expliquer…
Il faut aussi avoir des certitudes sur la méthode et surtout solutionner « la croix des inquiétudes ».
Qu’est-ce que la « croix des inquiétudes » ?
J’ai passé ma vie professionnelle à accompagner les réformes et ses conséquences sur les agents. Le problème aujourd’hui c’est que beaucoup d’évolutions se font pour de mauvaises raisons, essentiellement budgétaires. Intervenir sur des organisations humaines avec pour seule motivation les économies, c’est l’échec assuré. Pour accompagner et réussir le changement, il faut chaque fois répondre à quatre questions que se posent systématiquement les agents et que j’ai baptisé la « croix des inquiétudes » : où vais-je travailler demain ? Pour quelle situation, quels avantages vais-je en tirer, quels inconvénients ? Avec qui vais-je travailler ? Avec quels outils ? La question des outils est essentielle. Notamment, l’évolution du SIRH est un chantier dans le chantier qu’il ne faut pas négliger. Mais si on ne veut que rassurer, il faut oublier le changement !
Et les centres de gestion dans tout ça ?
J’ai été amené à travailler dans un centre de gestion car je suis un fervent défenseur de la mutualisation. Les centres de gestion sont des appuis, notamment pour mettre en œuvre la réforme territoriale. Nous proposons un accompagnement organisationnel aux collectivités et individuel pour les mobilités, avec du coaching par exemple.
Presentation Olivier Ducrocq Cdg69
Cet article est en relation avec les dossiers
- « Réforme territoriale : quelles conséquences pour les agents ? » - Club RH - Paris
- « Réforme territoriale : quelles conséquences pour les agents ? » - Club RH - Toulouse Métropole
- Acte III de la décentralisation : la réforme pas à pas
- Anticiper la réforme territoriale et accompagner les agents
Cet article fait partie du Compte-rendu
Les conséquences de la réforme territoriale sur les agents : de la théorie à la pratique
Sommaire du dossier
- Les conséquences de la réforme territoriale sur les agents : de la théorie à la pratique
- Réforme territoriale et droits individuels et collectifs : les incertitudes
- Fusions, mutualisations, « il faut solutionner la ‘croix des inquiétudes’»
- « Toutes les décisions se préparent en binôme de travail Auvergne Rhône-Alpes »
- Mutualisation : « La seule difficulté a été l’harmonisation des avantages »
- Conduite du changement : « les managers doivent être responsabilisés »
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