Depuis début septembre, l’association d’aide à domicile en milieu rural (ADMR 76) se trouve en cessation de paiement. Les salaires du mois d’août n’ont pu être payés. C’est la plus importante structure de ce type à l’échelle du département de Seine-Maritime. Aujourd’hui, elle emploie 1 500 personnes mobilisées quotidiennement auprès de 9 000 familles. Selon toute vraisemblance, l’ADMR 76 devrait être placée ce jeudi 17 septembre en redressement judiciaire. Un nouveau plan de sauvegarde de l’emploi – le deuxième après celui mené en 2014 (200 emplois supprimés) – n’est pas à exclure.
Les tensions avec le département illustrent les difficultés persistantes du financement de l’aide à domicile, un des noeuds de la future loi sur le vieillissement en cours de discussion au Parlement.
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Baisse continue d’activité
« Nous sommes dans une situation financière très délicate », concède Thierry Montreuil, président de l’association. Selon lui, cela s’explique par une baisse continue de son activité, notamment via les plans d’aide élaborés par les travailleurs sociaux du département. La structure doit également faire face à la concurrence exacerbée de nouveaux opérateurs privés. « Entre fin 2012 et aujourd’hui, nous avons perdu environ 500 000 heures de travail par an », détaille le responsable de l’ADMR 76. A cela s’ajoute un autre problème : la distorsion entre le taux horaire de prise en charge fixé par le conseil départemental et le coût de revient réel d’une heure de travail. « Le montant actuel de 19,40 euros ne nous permet pas de couvrir nos charges », constate Thierry Montreuil.
“Problèmes de gestion interne”
Le président a sollicité le conseil départemental, principal financeur de l’ADMR 76, pour obtenir une revalorisation. « Ce n’est pas à l’ordre du jour », rétorque Agnès Firmin Le Bodo, 1ere vice-présidente en charge des affaires sociales. « Cela ne règlerait rien », justifie-t-elle. En 2014, le montant a été augmenté à deux reprises sans que la situation de l’association ne s’améliore. Selon elle, les difficultés actuelles s’expliquent d’abord par “des problèmes de gestion interne liés à un accord sur la modulation du temps de travail ». Selon ce système, en période de contraction de l’activité, l’association rémunère des heures de travail non effectuées, grevant encore un peu plus ses comptes.
S’il admet « des difficultés » en lien avec ce fonctionnement, Thierry Montreuil n’y voit pas la cause principale de la situation actuelle. Le responsable de l’ADMR se prononce en faveur d’une refonte du mode de financement : « La signature d’une convention de moyens et d’objectifs pluriannuelle avec le versement d’une dotation globale nous donnerait beaucoup plus de sécurité et de visibilité. » Un changement auquel se refuse le département de Seine-Maritime. L’élue en charge des affaires sociales plaide d’abord pour une restructuration. « Nous sommes prêts à apporter notre aide », propose la 1ere vice-présidente.
Modèle économique défaillant
Compte tenu de son poids et de ses missions, le département ne peut se désintéresser du « cas » ADMR 76. En début de mois, il a apporté une avance de trésorerie de 900 000 euros pour permettre le paiement de 80 % des salaires de septembre. En outre, l’association perçoit 17,3 millions d’euros chaque année au titre de l’APA sur un budget global de 75 millions d’euros. « Nous serons très vigilants à ce qu’elle puisse continuer à exister », insiste Agnès Firmin Le Bodo tout en précisant que les marges de manœuvre de la collectivité sont « très limitées ». Dans ce contexte, l’élue laisse entendre que seule une nouvelle avance de trésorerie serait envisageable. Concernant une éventuelle aide d’urgence, elle la conditionne à une participation principale de l’Etat. « L’actuel modèle économique est défaillant au niveau national », soutient-elle. Et l’élue d’espérer que la loi sur le vieillissement vienne apporter des solutions viables et pérennes.
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