Mais ce qui ressort particulièrement de cette série de jugement, c’est la façon assez dure avec laquelle le juge stigmatise la désorganisation des services, créant un nouveau champ juridique de mise en jeu de la responsabilité des collectivités dans l’organisation de manifestations publiques.
Pour mémoire, dans la soirée du 6 juillet 2001, un platane centenaire, haut de 40 mètres, s’était abattu sur les spectateurs d’un concert de plein air, sous l’effet d’une mini-tornade.
La force majeure écartée
On le sait, la force majeure ne pouvait, en aucune manière être retenue. Un événement de force majeure doit présenter la triple caractéristique d’extériorité, d’irrésistibilité et d’imprévisibilité (1).
Manifestement, la survenance de l’orage et des vents violents ce soir là n’était pas imprévisible : des bulletins régionaux d’alerte météo (BRAM) ont bel et bien été envoyés avant le spectacle. Le fondement général de la condamnation de la commune réside, donc, sur les dispositions de l’article L. 2542-4 du code général des collectivités territoriales relatif aux pouvoirs de police du maire dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin (2).
Des services cloisonnés
Reste alors une lecture, assez navrante du concours de responsabilisations de l’ensemble des services. Un enchaînement d’inactions, chacun s’estimant couvert par l’exercice par l’autre de ses responsabilités, mais sans véritablement s’en assurer.
Vision navrante, que le juge laisse clairement apparaître dans la motivation des jugements. Ainsi, la ville, qui avait eut connaissance des éléments techniques, aurait dû annuler le spectacle : la ville de Strasbourg s’est abstenue d’exploiter l’ensemble des informations dont elle était détentrice et d’user en conséquence de ses pouvoirs de police. Et le juge de poursuivre : l’organisation des services de la ville et de la communauté urbaine de Strasbourg a conduit à ce que les services des espaces verts de la ville et du courrier, incompétent en matière de pouvoirs de police, se sont retrouvés seuls destinataires des bulletins d’informations météorologique.
De façon générale, le juge stigmatise un dysfonctionnement résultant, d’une part d’un cloisonnement entre services (…) et d’autre part d’une absence de prise en compte des questions de sécurité civile liée à ce type d’événement au sein de l’organigramme de la ville.
La ville de Strasbourg, seule à être jugée dans cette affaire, en tant que personne morale, devrait faire appel du jugement.
Références
TA Strasbourg, 6 avril 2010, n n° 0601669 0601668, et suivantes
Domaines juridiques
Notes
Note 01 Lire notamment Conclusions du commissaire du gouvernement Latournerie sur CE 25 janvier 1929, Sous-secrétaire d’Etat des Postes et Télégraphes c./ Société du Gaz de Beauvais Retour au texte
Note 02 CGCT, article L. 2542-4 : (…) Le maire a également le soin : (…) 2° De prévenir par des précautions convenables, et celui de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, les accidents et les fléaux calamiteux, tels que les incendies, les épidémies, les épizooties, en provoquant aussi, dans ces deux derniers cas, l'intervention de l'administration supérieure ». Retour au texte