Pas convaincu par les récentes promesses mirobolantes du gouvernement, le comité directeur de l’Association des maires de France (AMF)(1) a décidé de monter d’un cran dans la protestation contre la baisse des dotations en engageant « une mobilisation nationale de tous les maires et présidents d’intercommunalité de France » et une journée d’action en septembre.
Celle-ci marquera l’acmé d’une grogne qui ne cesse de grimper depuis des mois. A l’occasion du congrès de l’AMF, en novembre dernier, des bataillons de maires voulaient déjà descendre dans la rue. Voire fermer leur hôtel de ville. Des perspectives qu’a, alors, discrètement écartées l’Association des maires de France, en pleine phase de transition entre le départ de Jacques Pélissard, et l’arrivée de François Baroin. Les administrés communaux n’avaient, selon elle, pas à pâtir de l’incurie de l’Etat.
Pression des maires de terrain
Depuis, l’AMF subit une pression très forte de sa base. Des collectifs de « maires en colère » fleurissent un peu partout. L’Association des maires ruraux de France (AMRF) surfe sur cette fronde, engrangeant les soutiens. Un pied dans l’AMF, un autre dehors, elle use de méthodes fort éloignées des standards de la maison-mère. Au menu : un peu de tam-tam médiatique et beaucoup d’agit-prop.
Invités le 16 avril dernier sur le plateau du Grand Journal de Canal+ sous la bannière du collectif « bleu blanc zèbre », un mouvement citoyen emmené par l’écrivain Alexandre Jardin, ils ont récidivé le 18 avril devant le Conseil Constitutionnel. Une instance qui, selon Vanik Berberian, président de l’AMRF, à l’initiative de la manifestation, « exprime des points de vue hostiles à la commune. »
En Ile-de-France aussi, la fronde progresse. Lors du salon des maires d’Ile-de-France, le 14 avril, des élus de droite ont organisé une manifestation juste avant l’intervention de Manuel Valls. Dans leur ligne de mire : la réforme territoriale et la baisse historique des dotations de l’Etat.
Pour le collectif intitulé aussi « Les maires en colère », ces mesures vont « ponctionner trois quarts du budget des communes et les déposséder de leurs prérogatives essentielles ».
Par cette démarche sans précédent, l’Association des maires de France veut « alerter solennellement » les pouvoirs publics et les habitants sur les conséquences de cette diminution des concours financiers de l’Etat sur le tissu économique local et l’emploi ainsi que sur les services à la population (état-civil, activités périscolaires, accueil petite enfance, services sociaux, installations et animations sportives et culturelles, etc…).
Une journée d’action nationale en septembre
En pratique, l’AMF entame une mobilisation de longue haleine en invitant chaque association départementale des maires à réunir, avant l’été, ses membres et à communiquer très largement auprès du grand public et des autorités locales sur les conséquences de la baisse des dotations.
Mais le point d’orgue sera l’organisation d’une journée nationale d’action au mois de septembre « dans toutes les communes de France ». Cette journée sera accompagnée d’une campagne de sensibilisation pour défendre le rôle et l’action quotidienne des maires et des services municipaux.
Au-delà de l’opinion publique, c’est bien sur l’issue des discussions budgétaires en cours avec le gouvernement que l’AMF entend peser de tout son poids. Plusieurs sujets brûlants sont sur la table : le soutien à l’investissement, la réforme de la DGF et le spectre d’une dotation calculée au niveau intercommunal, mais aussi le poids des normes, les transferts de charges et la révision des valeurs locatives.
« L’ampleur et la nature de notre mobilisation dépendra des réponses et des garanties que nous obtiendrons sur tous ces sujets d’ici au congrès des maires au mois de novembre », confiait récemment André Laignel, le premier vice-président de l’AMF.
Pour l’heure, l’association indique qu’elle « refusera tout nouveau transfert de charges ou de responsabilités qui continuent à se multiplier à travers lois, règlements et annonces gouvernementales ».
Des mouvements d’humeur réguliers
Depuis la fondation de l’AMF en 1907, les finances locales constituent la principale pomme de discorde avec l’Etat. Au lendemain de la deuxième guerre mondiale, les maires se rebiffent particulièrement. Tous exigent un soutien étatique pour la remise en état de bâtiments municipaux endommagés par la guerre. « Nous ne pourrons pas parvenir à rétablir des finances normales pour nos communes tant que ne sera pas intervenue la réforme des finances locales », cingle l’AMF. Une demande qui restera lettre morte. La réforme des finances, votée en 1952, ne contient aucune amorce de réforme de la fiscalité locale.
Aussi, les positions des maires se radicalisent. Le 23 novembre 1953, les édiles montent à Paris. Ils battent le pavé, rue de Rivoli, devant le Louvre où est, alors, basé le ministère du Budget. La « journée nationale pour l’autonomie communale » se solde par un succès. Lors du congrès, l’Etat donne du grain à moudre aux maires.
Mais avec la crise de 1973, la croissance ne compense plus l’inflation. Les finances communales se tarissent à nouveau. Et les maires haussent le ton. Des journées d’action sont organisées en 1975 et 1976. Le lobbying des maires finit par payer. L’AMF obtient à la fin des années 1970 l’instauration du Fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) et la création de la dotation globale de fonctionnement (DGF).
Thèmes abordés
Notes
Note 01 Cette instance réunit 100 élus et tous les présidents d’associations départementales de métropole et d’outre-mer Retour au texte