Les termes du débat sur l’opportunité d’une fusion ENA-Inet, sur lesquels j’ai déjà pu m’exprimer dans ces colonnes, se résument souvent à l’explicitation de différences entre administrateurs territoriaux et civils ou entre fonction publique territoriale et fonction publique d’État. Toutefois, engager de la sorte ce débat revient à ignorer la question qui traverse aujourd’hui les écoles supérieures, et peut-être l’école en général, à savoir la valorisation de profils diversifiés.
Alors que les rapports des jurys déplorent, comme s’ils étaient impuissants, le conformisme des candidats, les études sociologiques sur le profil des administrateurs pointent la surreprésentation des cadres et des professions intellectuelles supérieures chez les parents des lauréats. Ces remarques ne débouchent jamais sur une question essentielle : à quelles conditions ces écoles peuvent-elles déjouer les constats qu’elles décrient, en cherchant à recruter des « profils » plutôt que des administrateurs déjà nés ?
L’une des solutions possibles, qui va plus loin que le rapport sur l’encadrement supérieur et dirigeant de l’État(1) mais répond au besoin d’élargir le vivier de candidats, implique de fusionner ces deux écoles. Pour les externes, étudiants qui sortent souvent des IEP, la fusion s’impose : même calendrier, mêmes élèves, mêmes épreuves, pourquoi distinguer les lauréats ?
Pour les internes, titulaires et contractuels, ou pour les troisièmes concours, l’organisation d’un examen professionnel devrait permettre à des recruteurs de distinguer des profils remarquables, riches d’expériences diverses. Ce « cursus honorum » de l’encadrement supérieur pourrait ainsi offrir à une méritocratie qui s’est essoufflée l’inspiration qui lui manque.
Les enjeux qui traverseront la fonction publique de demain ne trouveront de réponse que dans la mise en avant d’administrateurs ouverts, polyvalents et mobiles. La séparation des deux écoles, fondée sur une différenciation artificielle des métiers et des parcours, conduit à favoriser ces formes de corporatisme que nous dénonçons tous. Gageons que la fusion des deux écoles permette de faire émerger de nouveaux profils, plus à même de relever les défis qui nous mobiliseront, nous, administrateurs.
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