Comme le reste du pays, les bibliothèques ont vécu intensément les événements de janvier dernier. Certaines ont publié le visuel « Je suis Charlie » sur leur site internet, d’autres non. Les unes ont exposé livres et revues, parfois établi une liste de sites web, d’autres non. Sans compter bien évidemment les hommages aux autres victimes des attentats : policiers et clients de l’épicerie casher. Des discussions ont souvent eu lieu avec le public, notamment les jeunes, amenant des bibliothécaires à informer, à contextualiser. Voilà qui rappelle que la bibliothèque est aussi une « fabrique du citoyen », selon l’intitulé du congrès organisé par l’Association des bibliothécaires de France à Lyon, en juin 2013.
« Et maintenant, qu’est-ce qu’on fait ? » À l’heure où, légitimement, monte de toutes parts cette question, il appartient aux bibliothécaires, mais aussi aux collectivités dont ils relèvent, à leurs élus et cadres dirigeants, d’apporter une contribution à cette interrogation collective. C’est l’occasion de reposer la question du pluralisme en bibliothèque, notamment dans le domaine de la presse, dont les abonnements coûtent cher. L’offre d’une bibliothèque n’est pas seulement le reflet de ce qu’attend la population qui la fréquente, qui habite, travaille, se déplace à proximité : c’est aussi un morceau de la République, une fenêtre sur le monde.
Mais il y a aussi là bien autre chose qui se joue. Nombreuses ont été depuis ces événements les références au rôle de l’école. Or les bibliothèques sont aussi des lieux où peut se tisser, se réparer le lien social. Où les publics, les générations se mêlent. Où des jeunes séjournent parfois en masse. Elles sont des maisons communes. Elles sont là, à proximité, dans les quartiers et les villages. Elles y sont souvent les seuls équipements publics ouverts à tous sans justification ni tarification ni discrimination. Elles sont un outil du vivre-ensemble. Servons-nous en ! N’est-ce pas le moment de le proclamer avec force ? De rappeler aux élus qu’ils ont cet outil à leur disposition ? De signaler aux médias que les bibliothèques existent dans la cité ? L’esprit du 11 janvier 2015, ce n’est pas une sorte d’unanimisme, non souhaitable en démocratie. C’est un programme de travail. Nous en sommes.
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