Si la qualité du dialogue social a juste été évoquée avec l’amorce d’un calendrier sur ce thème à partir du 9 février, l’essentiel de la réunion du jeudi 29 janvier 2015 à la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP) a consisté en un bilan des élections professionnelles du 4 décembre 2014 dans les trois fonctions publiques.
En présence de Marie-Anne Lévêque, directrice générale de l’administration et de la fonction publique, les organisations syndicales ont fait part de leurs constats sur l’organisation des scrutins, la communication dont ils ont fait l’objet et leur cadre juridique. Une réunion spécifique à la territoriale a été demandée à la direction générale des collectivités locales (DGCL) pour trouver des solutions, notamment réglementaires, aux problèmes soulevés.
Recours sur les désignations de délégués en CAP
Parmi les difficultés relevées le soir des élections, la répartition des sièges par groupe hiérarchique dans les commissions administratives paritaires(CAP) a fait l’objet d’interprétations diverses qui suscitent des recours, alors que les organisations syndicales ont jusqu’au 4 février pour contester les résultats.
FO en a déposé une vingtaine, certaines listes n’ayant pas obtenu d’élus alors que leurs candidats estiment, sur la base de la décision 195786 du Conseil d’état du 15 octobre 1999 (vile de Dieppe) qu’ils auraient dû en avoir.
Chute de la participation : le tour unique et le vote par correspondance mis en cause
Sujet de débat, la forte diminution du taux de participation par rapport au précédent scrutin de 2008 a été analysée comme le résultat d’une élection organisée pour la première fois sur un seul tour. « Auparavant, s’il n’y avait pas 50 % de votants au premier tour, un second était organisé. Cela représentait un coût pour les collectivités qui cherchaient à éviter cette hypothèse. Le fait qu’il n’y ait plus qu’un tour, quel que soit le nombre de votants, les a rendus moins vigilantes dans l’organisation des élections », souligne Dominique Regnier, secrétaire fédéral de la Fédération des services publics et de santé FO.
Certaines communes n’ont d’ailleurs pas organisé les élections.
Pour la CGT, c’est le vote différé par voie postale qui est en cause. « Dans ce bilan, nous avons insisté sur l’effet du mode de scrutin sur la participation. La forte baisse, dans la territoriale, s’explique par le choix du vote par correspondance. Le fait qu’il n’y ait pas eu un jour de vote identique pour tous, sur le lieu de travail, a dilué le geste citoyen. Cette individualisation de l’élection a nui à la participation », estime Baptiste Talbot pour la Fédération des services publics CGT, qui refuse l’idée, émise par la DGAFP, d’une évolution ultérieure « naturelle » vers le vote électronique.
Des prestataires privés qui n’ont pas rempli leur mission
A propos du vote par correspondance, utilisé par nombre de centres de gestion et de conseils généraux ou régionaux, les critiques ont fusé. Ainsi, malgré les efforts de communication du Centre interdépartemental de gestion de la petite couronne de la région Ile-de-France, la participation pour les CAP de catégorie C a diminué de moitié.
« Le nombre d’électeurs inscrits pour voter en CAP, toutes catégories confondues, a augmenté de 130 000 depuis la dernière élection. Or le nombre de suffrages exprimés a globalement diminué de 15 000 », note encore Baptiste Talbot qui estime que l’ampleur du recul ne traduit pas seulement une désaffection des électeurs, notamment de catégorie C.
Parmi les écueils d’ordre pratique, l’acheminement du matériel électoral, confié à des prestataires privés, dont Docapost, filiale de La Poste, a révélé ses limites. Nombre de plis n’ont pas été envoyés et reçus dans les délais, des bulletins manquaient dans les envois ou se sont révélés non conformes, comme ceux portant le sigle d’une organisation au recto et celui d’une autre au verso…
Des collectivités qui ont fait obstacle au droit électoral
« Même si la DGCL a été très présente et réactive durant les élections, nous avons décelé un certain nombre de dysfonctionnements », remarque encore Dominique Regnier qui déplore que, localement, des collectivités aient privé des délégués de listes d’autorisations d’absence pour aller surveiller les bureaux de vote ou observer les dépouillements.
« Certains délégués n’ont pas pu vérifier le bon déroulement des élections. C’est une entrave au droit de vote alors que l’on entre dans un nouveau cycle d’élections avec les rapprochements entre établissements publics ou fusions. Il faut régler ces difficultés avant les prochaines élections, comme en novembre prochain au Grand Lyon », estime encore le représentant FO qui suggère que les précisions à apporter fassent l’objet d’une circulaire.
Interrogations sur la représentativité de certaines organisations
Si l’autre enjeu des élections 2014, qui appliquaient pour la première fois les accords de Bercy, était la mesure de la représentativité, les désignations dans les instances nationales continuent à faire débat. Au Conseil commun de la fonction publique, 30 sièges sont réservés aux organisations syndicales dont 10 pour la territoriale.
Un chiffre trop élevé, selon Baptiste Talbot : « La CFTC, qui représente une fraction extrêmement réduite des agents, en obtient un parce qu’il y a trop de sièges au conseil commun, alors qu’elle n’en détient aucun dans les conseils supérieurs. Nous ne sommes pas contre l’expression des minorités syndicales, mais cela complique le dialogue social », juge ce représentant de la première organisation territoriale.
Face à cet éventail de questions pour l’avenir, la DGAFP n’a pour l’instant pas apporté de réponses, hormis la promesse d’une étude sur le lien entre participation et mode de scrutin dans les prochains mois.
Références
Retrouvez les résultats des élections professionnelles pour les CT dans la fonction publique en 2014
publiés par la DGAFP.
Cet article fait partie du Dossier
Elections professionnelles dans la fonction publique 2014 : tous les résultats, tous les enseignements
Sommaire du dossier
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