Deux députés, Jacques Alain Bénisti (UMP) pour le Val de Marne, François Pupponi (PS) pour le Val d’Oise, le directeur de la police municipal d’Orléans, Pascal Desuert et Steve Richard, président de l’Observatoire de la police municipale (ONPM) se prononcent sur les dispositions du texte qui touchent les collectivités et notamment celles concernant la police municipale et la vidéosurveillance, rebaptisée pour l’occasion « vidéoprotection ».
L’octroi de qualité d’APJ fait débat
Le texte prévoit d’accorder la qualité d’agent de police judiciaire (APJ) aux directeurs de police municipale qui regroupe de plus de 40 agents.
Steve Richard conteste l’intérêt même de cette disposition.
Concrètement, cela signifie que ces policiers municipaux peuvent désormais procéder au dépistage de l’alcoolémie, à titre préventif, sous l’autorité d’un officier de police judiciaire. En cas de tests positifs, ils sont habilités à retenir, à titre conservatoire, le permis de conduire du conducteur.
Pascal Desuert, directeur de la police municipale d’Orléans y voit une garantie de suivi des dossiers :
Pour Jacques Alain Bénisti, c’est une clarification des rapports entre police municipale et police nationale et un vide juridique qui est ainsi comblé.
Steve Richard détaille pour quelles raisons la qualité d’APJ n’est pas adaptée.
François Pupponi y voit une mise sous tutelle de l’Etat de la police municipale.
Vers quelle police municipale ?
Si en pratique, seule une centaine de directeurs de police municipale sont concernés par la disposition qui prévoit l’octroyer de la qualité d’APJ, ce changement interpelle nos interlocuteurs. Quelles doivent être les missions de la police municipale ? La question divise.
Le président de l’ONPM fait part de ses craintes et redéfinit ce qui devrait constituer les missions de la police muncipale
De la vidéosurveillance à la vidéoprotection
Le mot «vidéosurveillance» est remplacé par le mot «vidéoprotection» dans tous les textes législatifs et réglementaires. Le texte prévoir notamment une série de dispositions destinées à faciliter l’installation de caméras sur la voie publique. Le maire doit toutefois en être informé.
Le préfet peut se substituer au maire récalcitrant pour installer un système de vidéosurveillance aux fins de prévention d’actes de terrorisme et de protection des abords des installations d’importance vitale.
Les collectivités peuvent désormais déléguer le visionnage de la vidéosurveillance à des opérateurs privés. Une convention agréée par le préfet devra toutefois être établie. En outre, les opérateurs ne pourront visionner que le flux d’image «en direct», pas les enregistrements.
Pascal Desuert, directeur de la police municipale d’Orléans fait le lien entre octroi de la qualité d’APJ et exploitation de la vidéosurveillance :
Jacque Alain Bénisti, opposé à la délégation à des opérateurs privés, rappelle le rôle central des équipes communales.
Pour François Pupponi, le déploiement de la vidéosurveillance doit être contrôlé. Il dénonce la libéralisation de ce déploiement. En séance, l’opposition a fait adopter un amendement rectifié prévoyant que le maire soit « informé » de la pose de caméra par les bailleurs privés. L’amendement original prévoyait que le maire donne son accord.
Le contrôle des fichiers
Le contrôle des images incombe dorénavant à la Commission nation de vidéosurveillance et non à la Cnil comme cela avait été réclamé pendant les débats.
Pour le député UMP Jacques Alain Bénisti, la charge de travail serait insoutenable pour la Commission. En séance, le ministre de l’Intérieur Brice Hortefeux a rappelé qu’il y a aujourd’hui 10.000 autorisations d’installation par an ; ce qui signifie que si l’on confiait cette compétence à la CNIL, celle-ci serait obligée d’examiner 200 demandes d’autorisation par semaine, et cela lui serait matériellement impossible.
Un faux problème pour François Pupponi qui propose d’augmenter les moyens de la Cnil.
Qui va payer ?
Salaires des agents, installation des équipement et coûts de fonctionnement : la question du financement est un sujet brulant. Alors que la RGPP prévoit la suppression de 9000 postes de policiers et que le FIPD est en baisse par rapport à 2009 (35 millions d’euros pour 2010), les collectivités craignent de devoir supporter la note.
Pour Jacques Alain Bénisti, l’Etat devrait inverser le système en finançant le fonctionnement et non l’installation.
Le député PS François Pupponi voit dans la multiplication des caméras une tentative de l’Etat de pallier le manque d’effectifs. Il dénonce le mode de répartition des fonds.
La place des maires dans le dispositif
Entre la possibilité laissée aux préfets d’imposer l’implantation de caméras dans les communes, la délégation de la vidéosurveillance à des opérateurs privés et la nouvelle qualification des directeurs de police municipale, la question de la place du maire divise.
Pour Jacques Alain Bénisti, le maire reste au centre du dispositif.
Un avis diamétralement opposé pour François Pupponi qui voit dans le texte de Loppsi une recentralisation des politiques locales de sécurité.